samedi 18 mai 2024

L’art de la guerre illustré : la guerre en Ukraine.

Les drapeaux sont aux couleurs locales: ah! mais lesquelles?


    Ce qui s’appelait originellement Opération Militaire Spéciale est presque toujours mal compris en Occident, que ce soit à dessein ou par ignorance. L’idée qui traîne actuellement dans tous les cercles d’experts militaires occidentaux que l’armée russe s’est améliorée depuis février 2022 est vraie comme une vérité de la Palisse est vraie ; elle ne sert qu’à justifier leur fausse analyse antérieure que l’armée russe de 2022 était incompétente, pas motivée, sous-équipée, ou avec des équipements obsolètes. Cette grossière erreur d’analyse ou cette incompréhension totale est doublée d’une posture, d’un discours extraordinairement dangereux. 
    En guise de préambule, je donne ici quel est à mon avis le point crucial qu’a oublié ou que refuse de voir l’Occident. Je ne m’attarde pas sur le discours ukrainien, qui n’a pas vraiment d’importance, et qui est à mettre sur le compte de têtes brûlées qui n’ont rien à perdre, ayant de toute façon déjà entièrement ruiné le pays. Néanmoins, on aurait pu espérer de la part des responsables occidentaux, les montreurs de marionnettes, qu’ils fassent davantage preuve de lucidité et — justement — de responsabilité. Or, leur discours est incroyablement dangereux et irresponsable. Leur obstination à transformer ce conflit en combat entre le bien et le mal, en employant une posture morale et parfois eschatologique qui rappelle le discours israélien vis à vis de la Palestine et de ses voisins arabes en général, est périlleuse à l’extrême. Peu importe ce que vous pensez de la Russie, peu importe que ses raisons pour déclencher son Opération Militaire Spéciale vous paraissent bonnes ou mauvaises, il y a au minimum un point que vous ne devez jamais perdre de vue, pas une minute : la Russie est une puissance nucléaire et il est hors de question de rentrer directement dans un conflit avec elle quand vous êtes vous-même une puissance nucléaire. Il est à peu près certain — et il serait idiot au possible de vouloir absolument vérifier cette assertion — qu’une guerre ouverte entre l’OTAN et la Russie amènerait au final à une guerre nucléaire. Quand la Terre sera dévastée et invivable, cela nous fera une belle jambe de savoir que la « vertu » a gagné. Ce doit donc être un principe absolu dans la pensée stratégique de ceux qui nous gouvernent et malheureusement, on doit constater qu’il n’est pas compris par tout le monde… Pour le moment, l’irréparable n’a pas été commis et on peut se féliciter de la retenue dans les actes des deux camps. Les occidentaux évitent d’envoyer des armements trop dangereux à son proxy et de son côté la Russie feint de ne pas savoir que ce sont des awacs qui surveillent le ciel et fournissent tous les renseignements nécessaires à l’artillerie et aux lance-missiles ukrainiens pour cibler les forces russes, que ce sont des militaires occidentaux qui sont aux commandes des équipements les plus modernes (et les plus onéreux), que les soi-disant mercenaires sont en fait pour la majorité des conseillers militaires ou des spécialistes d’opérations spéciales venus des divers services occidentaux. Mais plus le temps passe et plus il devient clair que cette retenue de l’OTAN est plus liée à une impuissance qu’à un manque d’envie. Si de plus, jusqu’ici, les pays occidentaux croyaient que l’Ukraine pouvait triompher en solo avec leur aide, c’est maintenant terminé et il est évident que certains cherchent une méthode plus ou moins astucieuse pour faire rentrer aussi discrètement que possible l’OTAN sur le terrain, pour de vrai, sans plus se cacher. La constatation simple qu’ils ne peuvent vaincre la Russie sur son terrain par les méthodes conventionnelles ne semble pas pourvoir les dissuader. En effet, comment dans un combat entre le bien et le mal, l’ange d’Occident pourrait accepter de ne pas continuer à combattre le démon maléfique venu de l’Est ?
    Bien, passons maintenant aux faits et à la partie plus substantielle de ce conflit.
    Je vais ici essayer de décrire clairement ses phases successives, ses causes et ses conséquences très prévisibles — mais jamais certaines évidemment (l’art de la prévision est très difficile, surtout dans l’avenir, comme disait quelqu’un). N’étant pas un expert militaire, je me contenterai de décrire les grandes lignes des événements, grandes lignes qui apparaissent toujours avec le recul, même pour un œil non spécialiste, à condition d’avoir bien fait ses devoirs auparavant, ce qui est sans aucun doute mon cas. Après tout, il n’est pas nécessaire d’être grammairien diplômé de la Sorbonne pour reconnaître les propositions successives d’une phrase, ses articulations et sa signification générale.

    Tout d’abord, il est utile et en fait nécessaire de réaliser que la guerre n’a pas commencé en février 2022. Ce n’est pas une théorie, c’est un fait. Elle a commencé comme une guerre civile en 2014, entre Ukrainiens de l’ouest et Ukrainiens de l’Est pour faire simple. La cause est non moins certaine : le renversement du gouvernement de Yanoukovitch, élu aussi démocratiquement que ses distingués collègues d’Europe occidentale, un politicien modérément pro-russe, ce qui n’a rien d’une tare, et est même recommandé, surtout quand votre économie dépend plus qu’à moitié du commerce avec le grand voisin de l’Est. Sur l’opération « spéciale » de Washington consistant à apporter liberté et démocratie aux Ukrainiens selon ses méthodes habituelles, je vous recommande le très bon documentaire d’Oliver Stone sur ces événements bien documentés, dont j’ai oublié le titre mais vous le retrouverez facilement (« Ukraine on fire » ou quelque chose comme ça ; il existe en version française aussi, je crois). L’Ukraine est en effet un pays à peu également partagé entre les russophiles et les russophobes. Il faut ajouter que les russophobes comme les russophiles ont un point commun : ils parlent tous russe. Les Ukrainiens parlant spontanément l’ukrainien sont à peu près aussi nombreux que les Bretons parlant breton.
    L’Ukraine a une caractéristique plus ennuyeuse dans le fait qu’elle présente la plus grande concentration de nazis au monde actuelle. Tout au plus pourrait-on distinguer entre les vrais nazis, disciples de Bandera, majoritairement issus de la région de Lvov, qui ont fini par former le bataillon d’Azov, et les fachos plus ordinaires de Right Sector, Kraken et autres milices paramilitaires qu’on peut trouver en revanche partout (à l’époque, c’étaient des paramilitaires, maintenant ce sont des militaires tout court : ils forment même l’épine dorsale de l’armée ukrainienne actuelle. Zalujny, l’ancien chef d’état-major de l’armée, avait (et a toujours, j'imagine) un buste de Bandera posé bien en évidence sur son bureau et un autre sous forme de poster plaqué dans son dos. Et naturellement les nazis font des trucs de nazi : à quoi s’attendre d’autre ? Aussi, suite au massacre de Maïdan, orchestré selon les principes éprouvés de la CIA, un simple hors d’œuvre, ils se promettaient de remettre de l’ordre dans tous les oblasts (régions de l’Ukraine) qui avaient la détestable habitude de voter à 90% pour les candidats russophiles et de vouloir parler leur langue maternelle où ça leur plait quand ça leur plait, le russe. Une politique de terreur et de ségrégation, digne de leurs modèles du troisième Reich, s’est alors mise en place dans tout le pays mais plus particulièrement à l’est.  Naturellement, quand vous déclarez à une grosse moitié de la population de votre pays que vous êtes des sous-citoyens, des sous-hommes, cela se passe mal. Des partisans très courageux (les premiers sont toujours les plus courageux, de très loin) ont décidé du côté de Donietsk et de Lougansk de sonner la révolte contre le gouvernement illégitime de Kiev, à peu près en même temps que la Crimée rejoignait la Russie. Vous vous demandez peut-être pourquoi les autorités de Kiev, menées par Porochenka et sa bande de mercenaires, n’ont pas bombardé alors la Crimée comme ils l’ont fait des oblasts de Donietsk et de Lougansk. Très simplement, parce que la Russie ne les aurait pas laissé faire et qu’ils pensaient à l’époque n’être pas prêts pour cette grande confrontation, inévitable. Poutine a dit que sa plus grande erreur était de ne pas être intervenu à ce moment-là en faveur des deux oblasts rebelles. Peut-être. On ne peut pas réécrire l’histoire. Peut-être aussi que la Russie n’était pas prête alors à affronter l’hydre à sept têtes (au moins) qui se cachait derrière le gouvernement mercenaire de Kiev, et en particulier l’ogre dévoreur d’enfants washingtonien. Quoiqu’il en soit, pas très fière d’elle, la Russie a laissé les nouvelles républiques de Donietsk et Lougansk se débrouiller seules contre le nouveau proxy otasunien. Tout au plus a-t-elle envoyé des armes, et pas des plus modernes, ainsi que quelques conseillers ou instructeurs, puisque les rebelles comptaient très peu de soldats de métier parmi leurs rangs. Jamais la Russie n’est intervenue directement dans le conflit entre 2014 et 2022. C’était de fait une guerre civile et aucun doute que cela le serait resté si le gouvernement fantoche de Zelenski, soutenu et encouragé financièrement, militairement, politiquement par Washington ne s’était pas senti pousser des ailes. Durant le laps de temps en effet, l’État-nation Ukraine était devenu l’instrument de prédilection de Washington et Zelenski sa marionnette des guignols préférée. Mais avec la manne venue de l’Ouest, ils avaient pu considérablement augmenter la taille de leur armée, bénéficier des bons conseils et autres supervisions otasuniennes, créer d’imposantes fortifications tout le long du front traversant les oblasts de Donietsk et Lougansk, et préparer en somme le terrain pour la guerre, la vraie, qui les opposerait à la Russie. Cat tel a toujours été le but de Washington : pousser la Russie à intervenir directement et lui casser les reins à la fois par la science militaire occidentale jugée très supérieure et par les sanctions économiques les plus dévastatrices jamais appliquées.
    Le souhait de Washington a finalement été exaucé en février 2022. Mais il faut remarquer que la Russie a traîné des pieds autant qu’il était humainement possible, cherchant une solution diplomatique, tandis que les enfants du Donbass se faisaient massacrer (ah, bien sûr, on ne vous en pas parlé à la radio-télé !). Combien de fois les diplomates et politiciens russes du plus haut niveau ont tenté d’obtenir un apaisement de la situation ? Dix fois ? Vingt fois ? Jusqu’à la fin ou presque, ils semblent y avoir cru, même après que les deux accords de Minsk aient été aussitôt bafoués par Kiev (et par ses généreux patrons occidentaux mais ça va sans dire). Disons-le clairement, Poutine a montré une grande frilosité ou une très grande prudence, choisissez le terme qui vous plaira. Mon impression est qu’il avait un gros doute, non sur la prépondérance de son armée face à l’ennemi, mais sur le niveau de résilience de l’économie russe face au déchaînement des sanctions qui ne manqueraient pas de leur tomber sur la tête. Finalement, quand il est devenu évident que Kiev était prête à liquider l’énorme ghetto qu’étaient devenus les deux oblasts tronqués de Donietsk et de Lougansk, ayant multiplié les bombardements par dix et ayant amené des troupes massives vers la ligne de front, il s’est résigné à donner le feu vert à l’armée pour intervenir et fait sa déclaration à la télé.
    Le premier plan des Russes, le plan A disons, était d’entrer très rapidement en Ukraine avec une force limitée, une grosse centaine de milliers de soldats, ce qui est très peu pour un pays de la taille de l’Ukraine (qui est, ou plutôt était, plus grand que la France, rappelons-le pour les prix Cécile Duflot de géographie). Cette force était jugée néanmoins suffisante pour atteindre les faubourgs de Kiev et d’autres grandes villes, Hrerson, Hrarkoff, Zaporodjié et mettre une telle pression sur le gouvernement ukrainien qu’il ne puisse faire autrement que venir à la table des négociations. Et ce plan a bien failli fonctionner. Il y a bien eu des négociations à Istamboul. Les propositions de la Russie, comparées à ce que peut espérer l’Ukraine aujourd’hui, étaient incroyablement généreuses : les Kiéviens gardaient l’intégralité de leur territoire, hormis la Crimée évidemment, sous condition de renoncer à leur politique de ségrégation antirusse, de renoncer à leur adhésion à l’OTAN, de se séparer des éléments nazis de leur armée et gouvernement. Les deux parties ont signé les premières moutures de l’accord de paix. Puis… Boris Johnson est arrivé. Bon, je n’étais pas là et je ne peux affirmer que le clown anglais est bien celui qui a tout fait capoter. Il y a tant de clowns qui se disputent la palme de l’absurde tragique aujourd’hui en Occident comme en Ukraine qu’il est difficile d’y voir clair sur qui prend réellement les décisions. Quoiqu’il en soit, le plan A des Russes a échoué in extremis. Je ne vois personnellement aucune erreur de l’État-major russe dans cet échec. Même s’il n’avait qu’une chance sur dix de réussir, il fallait commencer par là ; la possibilité d’épargner des centaines de milliers de vie humaines, d’éviter d’envoyer des millions de réfugiés dans la nature, sans parler des dégâts matériels colossaux, non seulement le justifiait mais l’exigeait. Cependant, ils ont probablement péché pour une fois par optimisme, faute rare chez les Russes, comme le montre leur relative lenteur à mettre sur pied une force beaucoup plus importante, nécessaire pour la phase qui allait suivre, la guerre d’attrition. (À ce sujet, on peut trouver étrange qu’un pays comme la Russie n’ait pas eu en réserve au moins une centaine de milliers de soldats, disponibles au pied levé, qui auraient permis de tenir Hrerson et la région de Hrarkoff. C’est bien sûr parce que ces réserves étaient déjà marquées pour une hypothétique attaque des Otasuniens, improbable certes mais que la Russie se devait, et se doit toujours, de considérer très sérieusement).
    Durant cette première phase de l’intervention russe, essentiellement couronnée de succès, il faut noter la rapidité stupéfiante avec laquelle les Russes ont pénétré en Ukraine, vraiment comme dans du beurre, prenant près d’un quart du pays en quelques jours. Pour une guerre de manœuvre, c’est un résultat d’autant plus impressionnant qu’à notre époque de satellites et de drones omniprésents — les Ukrainiens bénéficient à plein de l’ISR washingtonien — il est impossible en principe de bouger des troupes ou du matériel en masse sans que cela se sache. La seule manière d’expliquer la surprise et la déroute ukrainienne premières est leur conviction que l’armée russe attaquerait au Donbass. Et bien sûr qu’il y avait des forces massées à cet endroit, majoritairement les forces miliciennes de Donietsk et Lougansk, avec sans doute quelques brigades russes pour tromper l’observateur. Or, elle a attaqué partout sauf là, évitant les fortifications préparées longuement et amoureusement pour empaler l’envahisseur. Ils ont jailli simultanément de l’extrême sud et de l’extrême Nord, prenant complétement les forces ukrainiennes à revers. Certes, les Russes ont payé un prix pour cette avancée éclair mais comparé à ce qu’ils auraient payé en attaquant frontalement au Donbass, c’était presque une promenade de santé.
    Les Russes ne sont réellement passés au plan B qu’à la fin de l’été 2022. S’ils ont commis une erreur stratégique dans la conduite des opérations militaires, c’est là. On ne doit pas minimiser l’importance de cette erreur : elle a coûté et va continuer de coûter beaucoup de vie de soldats russes dans l’entreprise obligée de reconquête de ces territoires perdus puisqu’une partie se trouve dans l’oblast de Hrerson et une autre dans celui de Lougansk, territoires devenus russes depuis le referendum de septembre 2022. Entre-temps, après les accords avortés d’Istamboul au début du printemps, ils ont poursuivi le plan A et ont liquidé ou capturé le restant des nazis d’Azov, retranchés à Marioupol. C’est à ce moment précis qu’ils auraient dû enclencher le plan B, sachant maintenant que la guerre allait être totale. Mais ils ont tardé et la mobilisation partielle (très partielle) pour combler le déficit n’a débuté qu’en septembre. C’était trop tard. Les soldats ukrainiens étaient beaucoup plus nombreux et les Russes ont dû reculer, en bon ordre à Hrerson, en moins bon ordre à Hrarkoff. Dans ces opérations de reconquête relative, les Ukrainiens ont perdu un nombre ahurissant d’hommes, parmi leurs soldats d’élite, facteur qui a certainement contribué à l’échec de leur offensive de l’année suivante.
    Le plan B est donc décrit généralement par tous les observateurs, de quel camp que ce soit, comme une guerre d’attrition. La guerre d’attrition consiste à prioriser la destruction de l’ennemi, hommes et matériels, sur les gains territoriaux. Elle consiste aussi, bien sûr, à préserver au maximum ses propres troupes et matériels. Notez bien que c’est le plan de l’armée russe, certainement pas de l’armée ukrainienne, et encore moins de ses sponsors washingtoniens. Pour qu’une guerre d’attrition soit optimale, il est donc nécessaire de forcer l’ennemi à venir jouer sur votre terrain, ou tout au moins de l’y inciter. Défendre est normalement plus facile que d’attaquer, pour des raisons qui sont évidentes même pour un profane comme moi. L’armée qui attaque se découvre, en principe (on verra qu'on peut imaginer une exception à ce principe général), l’armée qui défend reste à l’abri de ses fortifications spécialement conçues à cet effet. C’est d’autant plus vrai si vous bénéficiez d’une puissance de feu supérieure, ce qui est indiscutablement le cas de l’armée russe. Au mieux de sa forme, au tout début de sa « fameuse » contre-offensive, et après avoir reçu les stocks de l’OTAN, l’Ukraine était peut-être à égalité en termes de munitions tirées par jour. Cette période de toute façon s’est très vite terminée. À partir de l’automne 2022 et jusqu’au début de l’automne suivant, l’armée russe n’a pas dérogé à cette stratégie. Et elle s’est avérée absolument dévastatrice pour l’adversaire. Pourquoi pensez-vous qu’il y a tant de discussions en cours en Ukraine pour mobiliser une nouvelle armée ou dans nos pays fantoches pour envoyer des troupes au sol ? La réponse est très simple : l’armée ukrainienne est devenue une estropiée, boitillant péniblement de ci de là pour maintenir un semblant d’illusion : il faut bien, sinon c’est la débandade complète. Tout le monde le sait. Là-haut. Mais vous, petit homme, vous n’êtes pas censé le savoir. Alors on continue de vous endormir avec des fables pour enfants de cinq ans. Bon, si vous préférez les contes pour enfant de cinq ans, c’est votre droit.

    Le succès total de cette phase de la guerre, vu de Russie, a été grandement facilité par la propension du gouvernement ukrainien à commettre encore et encore deux erreurs. La première est de vouloir passer à l’offensive quand la raison aurait dû lui dicter de préparer sa défense. Cela ressemble au joueur d’échec qui pense compenser la perte de ses pièces en se lançant dans des attaques tous azimuts ; bien sûr, le résultat le plus probable est qu’il va seulement parvenir à augmenter ses pertes relativement à celles de l’adversaire. La seconde est de vouloir coûte que coûte (on sait qui adore cette expression) s’accrocher à chaque miette de territoire, même pour des positions clairement désavantageuses, et ceci, presque jusqu’au dernier homme. Ah vous connaissez la formule favorite des politiciens de Washington : « combattez mes braves, combattez, jusqu’au dernier des Ukrainiens ! » Ces gens sont de grands philanthropes. Naturellement, si les chefs ukrainiens sont en réalité des mercenaires à la solde d'autrui et pour la plupart des crapules pendables, ils ne sont en revanche pas tous bêtes. Ils savent, au moins pour les plus éclairés — catégorie dans laquelle on ne peut ranger le Pinocchio vert de gris — que c’est une stratégie perdante. Perdante pour l’armée, pour le pays, pour la société ou ce qu’il en reste, mais pas pour eux. Ils ont parfaitement compris qu’ils devaient sans cesse alimenter l’espoir et l’illusion chez leurs grands amis de l’Ouest s’ils voulaient continuer à percevoir la manne sonnante et trébuchante en exécutant ces véritables opérations de communication, aux conséquences désastreuses pour leurs soldats. Et donc ils continuent. Même aujourd’hui dans l’état de délabrement pitoyable auquel sont arrivés l’armée ukrainienne et le pays tout entier, vous pouvez les entendre parler de repasser à l’offensive… en 2025… 2026… 2027… Ah mais attendez, Macron va envoyer ses soldats, sa grande armée napoléonienne d’au moins… une brigade. Quelle farce ! Sinistre farce !
    Ce choix très délibéré et maintes fois répété par l’état-major russe a donc été grandement favorisé par la stratégie otanukrainienne, en parfaite correspondance avec ce plan qui était : reprendre chaque mètre carré saisi par l’adversaire, y compris la totalité du Donbass, y compris et surtout la Crimée. En fait, les loyaux serviteurs ont été plus royalistes que le roi washingtonien, qui apparemment, se serait volontiers contenté de la Crimée. L’obsession des sponsors anglo-saxons en particulier à vouloir reprendre la Crimée reste quelque peu un mystère à mes yeux, à moins bien sûr qu’ils ne veuillent passer leurs prochaines vacances là-bas, mais en tout cas, cela convenait parfaitement à l’armée russe qui avait bâti sa plus formidable ligne de défense précisément pour en interdire l’accès, la maintenant célèbre ligne Sourovikine. On se rappelle du cimetière de blindés occidentaux à Rabotina. On se souvient comme les cimetières d’hommes ont soudain fleuri jaune et bleu dans toute la nation kiévienne. Quelle réussite, entièrement payée, conçue et pilotée par nos experts militaires : une gloire immense de plus à leur actif !
    Cette guerre par attrition imposait d’autres choix très logiques à l’état-major russe, qui ont souvent laissé perplexes ou critiques les observateurs pro-russes, bien à tort. Pourquoi ne pas avoir coupé les ponts du Dniepr dès le début des hostilités ? Pourquoi avoir attendu ce printemps pour détruire les centrales énergétiques du régime kiévien, hors centrales nucléaires (seuls les kiéviens sont assez irresponsables pour bombarder une centrale nucléaire, même à l’arrêt, comme celle de Zaporojié) ? Eh bien pour laisser venir l’armée kiévienne encore et encore, avec leur matériel lourd, là où les Russes ont leurs lignes de défense préparées, très à l’est du pays et donc bien plus favorable pour des questions évidentes de raccourcissement logistique. De même, il ne fallait surtout pas paralyser le pays en détruisant ses centrales énergétiques tant que l’opération d’attrition était en cours, de façon à ce que l’armée kiévienne reste aussi mobile que possible, toujours dans le même dessein. À dire vrai, il y avait aussi un autre motif à l’époque, humanitaire, qui était de limiter la souffrance du peuple civil ukrainien. Mais je crains bien que ces gentillesses ne soient plus de mise. Enfin, on peut signaler que le fait d’obliger l’armée kiévienne à venir affronter les Russes le long d’une ligne à peu près immuable a concentré les destructions sur une relativement faible portion du pays et donc préservé le reste. Je crois que c’était à un moment un objectif de l’état-major russe ; il est probable que ce n’en est plus un aujourd’hui et que la Russie a intégré le fait qu’elle devra reconstruire la majeure part des nouveaux territoires conquis.
    En fait, la guerre par attrition choisie par la Russie pour éliminer le danger ukrainien ne devrait pas surprendre puisque c’est en quelque sorte la spécialité incontestée de ce pays depuis des siècles. Les grandes manœuvres style blitzkriegs sont des exceptions dans son histoire et quand elles ont eu lieu, c’est toujours après une longue période d’attrition de l’adversaire. C’est probablement une des raisons pourquoi les Kiéviens ont été si décontenancés dans les premiers jours de l’Opération Militaire Spéciale par ce déploiement éclair en dehors de toutes les bonnes traditions locales. À la fin de la phase II, en octobre 2023, lorsque la Russie est passée à ce qu’elle appelle une « défense active », on peut estimer que l’essentiel était fait et que la suite des opérations ne ferait qu’officialiser ce qui était déjà patent : la défaite militaire de Kiev et de ses généreux patrons occidentaux. Pourquoi ? La colonne vertébrale de l’armée kiévienne est largement détruite avec la perte de ses soldats les plus chevronnés, ce qui ne peut être remplacé ni à court ni à moyen terme — les seuls termes envisageables pour une armée en perdition — l’assèchement très net des stocks d’armes disponibles chez ses généreux patrons et enfin la production d’armes et de munitions occidentale clairement incapable de suivre le rythme en accélération constante de sa contrepartie russe. Quand on connaît l’état industriel des pays occidentaux, y compris l’Allemagne, y compris les USA, et quand on regarde de l’autre côté la croissance industrielle de la Russie depuis au moins une décennie, ça n’a rien d’une surprise. Les occidentaux ont bu goulûment et avidement leur propre breuvage empoisonné, leurs propres mensonges, leur propagande absurde sur l’impotente Russie au PIB digne de l’Espagne (voir mon article précédent à ce sujet*)!
    La phase III, celle de la "défense active" a donc commencé officiellement en octobre 2023, après les fortes éclaircies dues à sa stratégie précédente. Disons que l’état-major russe a senti que l’adversaire était mûr, prêt à être cueilli. C’est alors qu’elle est partie à l’assaut du bastion cru imprenable d’Adviievka. On pourra remarquer à juste titre qu’elle avait déjà fait de même l’an précédent avec Bahrmout, au beau milieu de sa stratégie d’attrition ; soit on mettra ça sur le compte des exceptions inévitables dues à la mentalité russe, soit sur le fait qu’une opération isolée n’engage pas la stratégie globale, soit sur une erreur d’analyse de l’essayiste. Pour défendre celui-ci (si besoin était), j’invoquerai les mânes du disparu très peu regrettable Prigojin et du fait qu’il était ce qu’on appelle communément un électron libre, clairement rétif à toute stratégie venue de l’état-major. Mon idée sur la question est que si l’état-major avait été vraiment aux commandes de cette opération, et non les demi-mercenaires de Wagner, elle aurait pris un visage bien différent. De toute façon, l’opération d’Adviievka se distingue de celle de Bahrmout par le fait qu’elle a révélé pour la première fois depuis l’été 2022 l’intention de l’armée russe de pousser son avantage encore et toujours. Cette expression de « défense active » choisie par le ministère de la Défense russe, donc très officiellement, signifie que la stratégie de défense le long de lignes fortifiées à l’avance s’accompagne d’offensives limitées dans leur ampleur destinées à harceler l’adversaire, tout en conservant l’objectif prioritaire de l’attrition. Cette stratégie ne peut être payante dans le cadre d’une guerre d’attrition que si l’adversaire est déjà suffisamment affaibli, en particulier dans le secteur de sa défense anti-aérienne. Ceci permet en effet de faire intervenir beaucoup plus librement ses propres forces aériennes et réaliser par des bombardements massifs ce qui dans la phase précédente était réalisé par l’artillerie, les drones sur des unités en mouvement ; à savoir une destruction considérable des forces ennemis sans grand risque pour sa force aérienne et permettant d’attendrir suffisamment l’adversaire avant l’assaut des tranchées par les fantassins et blindés. Il y a toujours des pertes lors de l’assaut mais bien moindres que celles des défenseurs impuissants pris sous les bombardements massifs : on est bien donc toujours dans une stratégie d’attrition gagnante. De plus, les forces kiéviennes exsangues ayant par force dû se résigner à une stratégie défensive, il était devenu difficile de poursuivre cette attrition en attendant tranquillement l’ennemi dans les positions préférentielles russes.
    À la fin du dernier mois, ou peut-être même au tout début de mai — les sceptiques feront leurs propres recherches comme pour toutes les affirmations scandaleusement autoritaires contenues dans cet article — la Russie a annoncé officiellement quoique très discrètement par la voix du porte-parole des armées qu’elle était passée à la phase IV, l’offensive. Mon impression est que c’était déjà le cas depuis un petit moment. J’ai tâché de faire le compte des villages et villes (plus de 10 000 ha avant conflit) dont l’armée russe s’est emparée depuis la prise d’Adviievka à la mi-février jusqu’à la fin du mois d’avril, ce qui n’est pas si facile que ça en a l’air étant donné les va-et-vient inévitables et les désaccords entre observateurs du front (aussi bien russes qu’ukrainiens). Grosso modo, j’arrive à une vingtaine de villages et au moins trois villes prises, ce qui me paraît beaucoup pour de la « défense active ». C’est d’autant plus vrai que l’avancée russe à l’ouest d’Avdiievka a été de plusieurs dizaines de kilomètres. Quoiqu’il en soit, le nouveau terme « d’offensive » arrivé dans le lexique du très réservé Ministère de la Défense, est un signe annonciateur de gros orages à venir pour les pauvres diables poussés à la pointe de la baïonnette dans les tranchées kiéviennes par les mercenaires vert de gris de Zelenski. On imagine mal comment des missiles sol-sol ATACAMs ou des F16s si ceux-ci arrivent vraiment (c’est comme l’Arlésienne : on en parle sans cesse mais ils n’arrivent jamais) vont pouvoir leur éviter de se prendre sur la tête des pluies de bombes. Aux croque-morts : prévoyez donc 100 à 200 000 places de plus dans vos places de cimetière pour cette seule année et autant de jolis drapeaux bleus et jaunes.
    Une dernière remarque concernant cette nouvelle phase dite « offensive ». Autant que je puisse en juger, ces assauts sont toujours limités, utilisant relativement peu d’hommes et de matériels lourds, y compris dans la dernière poussée soi-disant de Hrarkov (je doute fort que cette ville soit la cible de l’opération), et je reste convaincu que le but premier de l’état-major russes reste encore et toujours l’attrition. Comme je l’ai expliqué, l’attrition se marie en général avec la défense et non l’attaque. Le fait que les Russes ont visiblement l’intention de réaliser dorénavant cette attrition par l’offensive est possiblement une innovation stratégique (à discuter avec des historiens militaires). Cette volonté est en tout cas en plein accord avec l’accent mis ces derniers jours par Poutine sur l’importance du développement qualitatif et quantitatif des drones et autres robots militaires. Si vous voulez attaquer sans trop risquer de pertes, on ne voit en effet pas de meilleur moyen qu’une armée de robots. Oh, ne vous attendez pas à Terminator, mais attendez-vous néanmoins dans un futur proche à observer la première bataille de robots et cette bataille-là ne peut être remportée que par le pays le plus industrialisé.

    J’en viens donc tout naturellement à la partie spéculative de mon essai, les stratégies prévisibles des deux camps pour le temps à venir : je m’accorde deux années de visibilité avant d’aborder l’inconnu insondable. Pour l’Otasunie, il s’agit essentiellement maintenant de masquer sa défaite par des actions de plus en plus inconsidérées à mesure que Moscou étrangle Kiev, des actions qui venant de tout autre pays moins vertueux et démocratiques seraient qualifiées de « terrorisme » mais que l’on préfère renommer comme des opérations asymétriques. Le dernier projet en date est de détruire le pont de Crimée (qui n’a guère d’importance militaire, l’armée russe ne l’utilisant plus), ce qui est presque bénin comparé à certains projets plus grandioses comme l’attaque encore et toujours de la centrale nucléaire de Zaporojié, la plus grande d’Europe dit-on. Mais même dans cette stratégie strangelovienne, les Otasuniens n’ont pas les meilleures cartes. L’an passé, les patrons de Washington ont escaladé d’un cran la confrontation en envoyant des bombes à sous-munitions à leurs sbires au trident, normalement proscrites selon les conventions internationales (mais les règles bien sûr ne sont pas faites pour Washington) ; résultat : les Russes ont répondu avec les leurs et ils en possèdent beaucoup plus. Le même résultat sera immanquablement atteint avec n’importe quel armement utilisé. Les Russes ont beaucoup plus de munitions de tous types et il est certain que cette différence ne fera que s’accroître dans les deux ans à venir. Si nos psychopathes en charge visent des cibles civiles, faute de pouvoir s’attaquer à des cibles militaires, s’ils passent par des groupuscules ou mercenaires exotiques comme cela a certainement été le cas pour le massacre du concert à Moscou, ils s’exposent à des représailles tout aussi « asymétriques ». La solution évidente serait d’entamer un véritable processus de négociations avec Moscou mais c’est justement ce qu’ils ne veulent absolument pas faire car ce serait, de fait, reconnaître leur défaite, étant donné que les termes seront dictés par le camp d’en face. La diabolisation à outrance, à toute outrance comme dirait le cavalier blanc, des Russes et de Poutine en particulier, rend la chose encore plus impossible sans perdre complètement la face. Ils se sont littéralement fait piéger par leur propre rhétorique, leur propre propagande. La vérité est qu’ils se trouvent dans la situation du général qui a coupé tous les ponts derrière lui pour obliger ses troupes à toujours avancer et qui fait maintenant face à un mur de feu, sans nulle part où se cacher.
    Les conséquences de ce conflit seront terribles pour l’Occident dans son ensemble et pire encore pour son maillon faible : l’Europe. Aux yeux du monde, du reste du monde, de la grande majorité globale, il va perdre toute crédibilité, toute légitimité, tout respect. Le mieux qu’on peut espérer après ces dernières atrocités (je compte Gaza dedans) est de finir assignés à résidence dans notre île de liberté et de démocratie jusqu’à notre décrépiscence ultime, tandis que les corbeaux et autres vautours se rapprocheront lentement en cercles de plus en plus étroits au-dessus de nos têtes.
    Pour la Russie, que les nouvelles frontières soient le long du Donbass ou le long du Dniepr à la fin de la guerre, le challenge sera la reconstruction et le poids qu’elle va faire peser sur son économie. Il n’est pas sûr, pour le moins, que les investisseurs se pressent au portillon, voyant l’étendue des dégâts et la perte démographique due à l’émigration massive de ces dernières années. Ce sera probablement long, probablement plus long que la reconstruction de l’Allemagne d’après-guerre, et se fera en plusieurs phases : la reconstruction des grandes infrastructures et des immeubles d’habitation, et seulement ensuite le redémarrage économique. En attendant, il est probable que la Russie va devoir sérieusement mettre la main à la poche pour faire vivre tous ces gens sans revenus bien établis. On peut supposer que le secteur agricole sera beaucoup plus prompt à repartir de l’avant, une fois que les champs auront été nettoyés de leurs divers engins d’artifice non récréative. On a eu la preuve que l’armée russe savait faire cela très vite, en particulier dans la région de Marioupol.
    Cependant, malgré les difficultés, cela se fera. La Russie a et aura encore plus dans les années à venir la puissance financière pour assurer le gros de la reconstruction. Actuellement, la Russie consacre autour de 6% de son PIB à la guerre (ce qui dans tous les cas n’est rien du tout comparé à une véritable « économie de guerre », contrairement aux affirmations des premiers prix Macron d’histoire et d’économie) ; eh bien elle consacrera cette somme à la reconstruction au lieu de la destruction. On peut aussi penser que le partenaire chinois sera intéressé à investir dans le projet « Nouvelle Russie » et peut-être même « Petite Russie » (c’était le nom de ces régions dans l’ancienne Russie), une fois le grand nettoyage et les principales infrastructures achevés. En fait, il n’est même pas évident que la Russie aura plus à payer que ce que l’Empire doit payer et va continuer de payer pour maintenir à flot le bateau fou et percé de toutes parts qu’est son proxy ukrainien. L’intégration des populations ne sera pas un gros problème : elles sont comme je l’ai dit très majoritairement russophiles et bien sûr russophones sans exception. On pourrait faire un parallèle avec les populations d’Allemagne de l’Est quand elles ont choisi de rejoindre la RFA. C’est d’autant plus tentant que les régions du Donbass, par faute d’investissement de la part de l’ex-nation souveraine d’Ukraine dans ces régions depuis 1991 sont très attachées sentimentalement à l’URSS ; tout ce qu’il y a encore de solide ici date en effet des soviétiques, ce qui rend les autochtones quelque peu nostalgiques de cette période. J’entends assez souvent des Russes s’étonner de l’atmosphère soviétique qui règne ici, comme si tout l’est (et le sud) de l’ex-Ukraine s’était figé dans le temps. Néanmoins, par comparaison avec la Crimée, qui était dans un cas similaire mais qui a de l’avance, on peut deviner que ces réticences fondront comme neige au soleil devant des retraites et des salaires plus élevés, une assurance sociale très généreuse (aussi généreuse en fait que celle qu’avaient les Français il y a trente ou quarante ans, en conjonction avec un système de santé très performant) des infrastructures neuves et surtout de vraies perspectives d’avenir. Et la Russie n’est pas la grosse dinde d’Allemagne, farcie par l’orifice habituel (je ne vous dirai pas par qui sauf que c’est un amateur de dindes et que son petit nom est Sam). Elle a un énorme potentiel qui va croissant ; investir n’est pas du tout un problème pour elle, c’est juste la question d’atteindre un degré d’attractivité suffisant car contrairement à ce que nos lavés du cerveau croient, ce n’est pas Poutine qui décide de tout en appuyant sur un bouton depuis son bureau du Kremlin. En appuyant sur un bouton, on peut éventuellement détruire un paquet de choses mais on ne peut rien construire.
    Le seul danger important qui guette dans les deux années à venir la Russie et le monde avec elle, n’est pas l’essor du terrorisme venu des restes fumant de l’Ukraine occidentale et occidentalisée, très prévisible en effet. Elle sait gérer comme on dit, elle a toute l’expérience qu’il faut : merci Washington, merci la CIA. En gros, elle saura faire passer le goût de ces aventures aux occidentaux et à Washington en particulier, au moins dans ses plates-bandes. Non, le danger est la prise de conscience actuelle de l’Occident de son incapacité à rivaliser avec la Russie dans le domaine des armements conventionnels. Le risque numéro 1, clairement identifié par les leaders russes, est donc la tentation pour quelques têtes brûlées occidentales (et ce n’est pas ça qui manque entre le derviche tourneur Macron, l’écervelée Von der Leyen et le sénile Biden, parfaitement mûr pour un second mandat selon les critères washingtoniens) d’utiliser des munitions nucléaires tactiques. Soyons clair, si Washington a la conviction qu’ils s’en tireront sans trop de dégât de leur côté, protégés des retombées par les deux océans, ils le feront, ou ils pousseront ces niais d'Européens à le faire pour eux. Et c’est pourquoi, très régulièrement, Poutine ou Shoïgou ou un autre doivent rappeler à ces irresponsables que la Russie est prête aussi pour ce genre d’actions et que leurs décisions auront des conséquences très désagréables pour tous les envoyeurs. D’après la plupart des gens mieux versés que moi dans cette matière, n’importe quelle munition nucléaire employée dans un conflit entre puissances nucléaires, même tactique (à faible rayon d’après ce que j’ai compris) entraînera fatalement une escalade menant à la guerre nucléaire totale.
    Pour finir par une note plus optimiste, raisonnablement optimiste, je dirai que la Russie, en payant beaucoup de sa personne, comme d’habitude, est en train de tracer la voie difficile et périlleuse qui nous éloigne de l’ancien monde, celui des empires hégémoniques, très belliqueux, ne supportant ni la contradiction ni la concurrence, pour aller vers le nouveau, beaucoup plus civilisé, mieux partagé, plus tolérant, plus divers. Oui, le monde est sur la bonne voie… tant que ça ne se termine pas en guerre nucléaire.

*Notons ce qui est tu soigneusement par nos grands et même petits médias : La Banque Mondiale, organisme peu susceptible de biais pro-russe, vient de faire paraître ses derniers calculs de PIB. Contrairement au FMI, elle recalcule tous les cinq ans les PIB nationaux en parité de pouvoir d'achat, estimant à juste titre que c'est beaucoup plus représentatif de la réalité d'une économie, bien que ça soit beaucoup plus compliqué et long à réaliser (d'où les cinq ans). Eh bien, ils se sont aperçus à New-York, oh surprise consternante, que la Russie était devenue la quatrième puissance mondiale économique mondiale, devant l'Allemagne et juste devant le Japon... et ceci depuis... 2021! Si on ajoute à ça que la Banque Mondiale est la première à reconnaître qu'il y a environ 40% de l'économie russe qui échappe à sa comptabilité, ça donne une tout autre perspective de la Russie actuelle que les bobards habituels.

(Une vidéo intéressante et quelque peu émouvante pour terminer, concernant la reconstruction de Marioupol, faite par un habitant de la ville : comparaison entre Marioupol avant 2022, pendant la bataille et actuellement, dans sa phase de reconstruction.)




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