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vendredi 1 novembre 2024

"Russie : un mystère drapé dans une énigme"*

 

Que diable fabriquent-ils?


Si vous vous intéressez aux événements géopolitiques majeurs qui ont cours en ce moment-même (quelle chance !), ce grand basculement des plaques tectoniques, vous vous êtes forcément demandé, une fois au moins, par quel miracle la Russie pouvait tenir tête et en réalité laminer lentement mais sûrement toutes les forces de l’OTAN réunies (les mercenaires ukrainiens ne servant que de proxy sacrifiable et relativement bon marché dans ce conflit Russie/Otasunie). On vous a dit et répété que le budget militaire de la Russie était dix fois moindre que celui des USA. Peut-être même avez-vous découvert que ce budget était environ 30 fois inférieur à celui de tout l’OTAN réuni (sans compter donc les acolytes du Pacifique). Comment est-ce donc possible ?

Dans cet article aux visions puissantes mais parfois trop simplistes, j’avais tenté une première explication pour éclaircir ce mystère. En bref, je supposais que la différence de pouvoir d’achat en Russie et aux USA pour une même quantité de dollars donnée compensait grosso modo l’écart de budget. En clair donc, je supposais qu’avec la même quantité de dollars, un Russe pouvait acheter dix avions, dix tanks, dix missiles, etc. quand l’Etasunien ne pouvait en avoir qu’un seul. Mais ayant fait mes devoirs et possédant maintenant une connaissance plus informée du sujet, je dois admettre que cette explication — malgré ses mérites incontestables — ne suffit pas. L’écart de prix entre un avion de chasse russe et un avion de chasse US, de même capacité et de même génération n’est pas d’un à dix mais en moyenne d’un à deux. Cet écart semble constant depuis des décennies et si on prend les chasseurs de dernière génération en activité à titre d’exemples, le Sukhoï 57 coûte respectivement 1,7 fois et 2,5 fois moins que ses deux vis-à-vis possibles, le F35 et le F22 (et 2 fois moins que le Rafale, dernière génération). Pour les munitions, l’écart est un peu plus grand mais on est toujours très loin d’un ratio d’un à dix. De plus, comme le conflit concerne l’OTAN tout entier, l’écart théorique à combler n’est pas d’un à dix mais donc, comme précisé plus haut, d’un à trente.

Comment résoudre l’équation, quelle inconnue doit-on ajouter pour au minimum équilibrer les deux côtés de la balance a été et est toujours un casse-tête chinois pour les plus grands experts militaires et économiques de l’Otasunie. Plus bizarrement encore, bien que je lise et écoute beaucoup de spécialistes russes, ou au minimum russophones, je ne peux pas dire que ces derniers m’aient semblé beaucoup plus versés dans les arcanes de ce mystère. Avec les Russes, vous devez de toute façon vous attendre à une réponse du style : « eh bien c’est comme ça parce que c’est comme ça : un point c’est tout ».

Pourtant, pas plus que moi, ils ne pensent que leurs systèmes d’armements seraient dix fois (ou trente fois !) supérieurs à ceux de l’OTAN.

Une partie du mystère peut être trouvée dans le fait que le rythme de production et donc la quantité de ces divers équipements militaires sont plus élevés en Russie que dans les pays de l’OTAN. Comme le disait Staline, la quantité a une qualité en soi qu'on aurait bien tort de dédaigner. Généralement les experts s’accordent pour dire que le rythme de production des différents armements est environ deux fois plus élevé en Russie que dans tous les pays de l’OTAN réunis. Toutefois, vous noterez qu’en plus d’être partielle, c’est une fausse explication. En effet, elle ne fait que déplacer l’énigme. Comment alors est-il possible qu’un pays qui a un PIB nominal cinquante ou cent fois moindre que celui du bloc adverse, les USA avec les Eurozonés plus les laquais du soleil levant ou des antipodes ait un rythme de production deux fois supérieur à celui de toutes ces fines fleurs de la civilisation, qui contient pourtant quelques puissances industrielles reconnues ? Bien sûr le PIB, comme indicateur de la puissance industrielle ou même économique d’un pays est pour l’essentiel une fable, un conte pour enfant, comme je l’ai indiqué dans un précédent article. Mais il reste tout de même un océan à combler.

Une autre petite partie de l’explication peut et même doit impliquer l’économie de type assez particulier qu’on trouve en Russie. Bien que celle-ci soit très largement privatisée, elle reste pilotée dans ses grandes directions par le Kremlin. Comme toujours, celui-ci agite aussi bien la carotte que le bâton, même si maintenant il se sert beaucoup plus de la première. Dans la Russie actuelle, les incitations sont massives pour que les industriels aillent dans la direction souhaitée ou plutôt les directions car il y a tout un éventail de domaines où l’État Fédéral investit lourdement et ces domaines n’ont souvent qu’un lointain rapport avec l’armée, et parfois aucun. Ce type de politique économique mixte, en partie dirigée, voire planifiée, est en sainte horreur chez nos zélotes du marché libre et concurrentiel, mais le fait est qu’elle marche pas si mal, en tout cas en Russie. Notons d’ailleurs que ce n’est pas fondamentalement différent des subventions très généreuses accordées par nos pays de l’Otasunie à certains secteurs privilégiés (mais avec une efficacité considérablement moindre comme chacun a pu se rendre compte à moins d’être greffé dans la Matrice depuis la couveuse). Enfin il y a en Russie ces entreprises qu’on peut qualifier d’étatiques — même si c’est un peu plus subtil que ça — comme ROSATOM, ROSTEC, ROSCOSMOS, GAZPROM. Leur particularité est qu’elles ne sont pas toujours tenues d’augmenter leur bénéfice ou parfois même d’en faire du tout mais qu’elles sont tenues prioritairement de réaliser les objectifs fixés par l’État, quitte à déplaire à leurs "actionnaires". Et quand le Kremlin leur dit d’augmenter la production dans tel ou tel secteur, eh bien elles l’augmentent. Dans une situation de guerre, c’est évidemment un gros avantage. Ajoutons que cette décision d’augmenter la production industrielle dans le secteur de l’armement et de tout ce qui s’y rapporte a été prise des années avant le début de l’Opération Militaire Spéciale.

En somme, on a en Russie une économie qui dans une mesure importante est au service de l’État et du pays quand nous avons par ici une économie entièrement au service de ses actionnaires, et surtout de ces quelques oligarques sans pays ni frontières qu’on retrouve dans tous les Conseils d’Administration des grandes entreprises et qui sont les seuls vrais bénéficiaires du système (avec bien sûr les politiques qu’ils arrosent dûment en retour de leurs bons services). À chaque fois que l’UE ou les USA ont tenté ces dernières années d’augmenter la production d’armements, cela s’est soldé par un échec à court et moyen termes, soit parce que les usines disponibles ne sont pas assez nombreuses ou manquent de la capacité d’accroissement (de par leur politique de flux tendu, elle-même découlant de leur politique de rendement financier maximal, elles sont presque toujours au taquet), soit parce que les prix se sont mis aussitôt à flamber. On en a eu un exemple spectaculaire cette année avec l’UE : après son appel d’offres pour acheter des obus de 155 mm (les principales munitions utilisées par les canons modernes sur le champ de bataille du côté otasunien) dont l’armée ukrainienne était (et est toujours) en manque, le prix de celles-ci a été quasi multiplié par dix sur le champ. Le résultat net a été que l’UE a pu acheter moins de munitions pour un prix plus élevé. Bien sûr, on peut toujours rêver et se dire que sur le long terme, la production d’armements de l’Occident finira par rejoindre celle de la Russie actuelle. Mais cela présuppose beaucoup d’événements improbables : 1) que la politique des entreprises d’armements occidentales fassent passer l’intérêt du bloc avant leur intérêt financier ; 2) que la Russie n’augmente pas elle aussi sa production durant ce laps de temps à la même vitesse voire à une vitesse supérieure ; 3) que la guerre en Ukraine ne soit pas terminée avant (par la victoire de la Russie).

 

Je n’ai parlé jusqu’ici que des facteurs palpables, matériels, qui peuvent en partie expliquer la contradiction entre ce que nous disent les chiffres bruts et les faits observables sur le terrain. J’ai tour à tour invoqué la différence de pouvoir d’achat, les capacités de production bien plus extensibles de la Russie et enfin la politique économique différente des deux blocs. Tout cela nous rapproche de la vérité, sans le moindre doute, mais on sent bien que le tableau n’est toujours pas complet. Même avec les faiblesses citées, le bloc occidental devrait au minimum pouvoir obtenir pat dans ce conflit, étant donné les énormes différences en son avantage de population ou de richesse. Or, il est de plus en plus clair que nous nous dirigeons vers un mat des Russes sur le roi ukrainien (qui en réalité est bien sûr un fou).

Et c’est là qu’on est obligé de faire appel à des facteurs humains, sociaux et psychologiques pourrait-on dire. Il est évident que nos pays ne sont pas du tout préparés à ce type de guerre totale comme celle qui a cours en Ukraine. Imaginez un instant que l’illégitime Macron ou la saucisse Scholz déclare dans un élan de zèle atlantiste la mobilisation générale ou même partielle : en moins de trois mois, le pays se viderait de ses éléments mâles en âge d’être conscrits pour des cieux moins sombres. C’est ce qui s’est passé en Ukraine. Mais le mouvement sera encore plus fort dans nos pays tout simplement parce que les gens ont plus d’argent, plus d’économies, et peuvent donc plus facilement passer à l’étranger ou envoyer leurs fils vers une destination sans risque pour le temps qu’il faut. Disons-le clairement, le fait que l’Ukraine soit le pays le plus pauvre d’Europe (à égalité peut-être avec la Moldavie, qui semble justement s’apprêter à suivre le chemin pavé de gloire de son voisin du nord), depuis des décennies, est un facteur majeur dans le "succès" de l’opération washingtonienne démarrée en 2014. Jamais sans cela, la CIA n’aurait pu transformer ce pays en moins de dix ans en poing armé contre les Russes et jamais l’armée ukrainienne n’aurait pu perdurer jusqu’aujourd’hui. De plus, dans nos pays, les populations sont tellement fragmentées entre les races, les religions, les opinions politiques, les classes, les multiples sexes et les âges qu’une mobilisation est la recette la plus sûre pour connaître de grands troubles civils. En fait nos gouvernements le savent si bien qu’ils n’essaient même pas (et ce n’est pourtant pas l’envie qui leur manque).

Mais la mobilisation se heurterait à un problème supplémentaire (contrairement à la Russie qui a gardé un service militaire obligatoire) qui est que nos armées sont à 100% professionnelles depuis des décennies, ce qui signifie qu’il faudrait partir de zéro pour faire du pékin pris dans la rue un soldat même minimalement compétent.

Enfin et surtout le problème majeur réside évidemment dans la motivation. Pensez-vous que les Français, les Allemands, les Anglais vont aller faire la guerre de tranchées pour des Macron, des Scholz, des Starmer, des Biden ou des Harris ou des Trump ? Autant croire au père Noël ! On peut déjà prévoir que les exemptions signées par le médecin de famille vont se vendre comme des petits pains.

D’une manière générale, ce qui manque chez nous est la culture de la guerre. Pour nous, Européens, et encore plus chez les Étasuniens qui n’ont pas connu de conflit sur leur terre depuis des lustres, la guerre est devenue une chose abstraite, virtuelle, lointaine, qu’on ne connaît que par des films ou des jeux vidéo. Là où la Russie a maintenue une culture de la guerre importante, en partie due au fait qu’ils ont perdu vingt-six millions de personnes lors de la dernière guerre mondiale, ce qui veut dire que toutes les familles russes ont encore aujourd’hui des parents qui sont morts à la guerre. La Russie est le seul pays d’Europe qui ait bâti une cathédrale, la plus belle cathédrale moderne, la cathédrale de fer, en hommage à leurs soldats disparus (voir cet article-ci). Que cette cathédrale soit dédiée à l’Armée Rouge n’a qu’une importance secondaire, que nous trouvions l’idée ridicule ou monstrueuse en a encore moins. Cette cathédrale magnifique est là et révèle une ferveur que nous sommes incapables de comprendre, encore moins d’imiter. En raison de cette culture, de ce marquage au fer rouge, l’État russe n’a eu aucune peine à ranimer la flamme de la grande guerre patriotique lorsque le moment est venu. Chaque mois, trente mille volontaires en moyenne affluent vers les centres de recrutement de l’armée de la Fédération. Ils viennent de partout, comme toujours davantage de la campagne que des villes et davantage des régions pauvres que des régions riches mais ils viennent et ils sont motivés, contrairement à ces pauvres ukrainiens (en attendant peut-être ces pauvres Polonais, ces pauvres Moldaves, ces pauvres Baltes, ces pauvres Roumains …). Une illustration flagrante a été dernièrement fournie par une initiative du gouvernement polonais qui a décidé de lancer un appel pour former une sorte de légion étrangère destinée à renforcer l’armée de Kiev. Comme la Pologne a reçu depuis quelques décennies un contingent énorme d’immigrés ukrainiens, plusieurs millions, elle pensait trouver facilement de quoi monter au minimum une brigade. Résultat, seule une quinzaine de volontaires ukrainiens se sont présentés, pas même de quoi faire une section (l’unité commandée chez nous par un adjudant ou éventuellement un officier subalterne type sous-lieutenant). Il est vrai que la paie et les primes éventuelles du soldat russe sont relativement importantes, surtout pour un paysan ou un ouvrier de Sibérie, de l’Oural, du Caucase, mais ce n’est qu’une incitation de plus. Les queues devant les bureaux de recrutement n’ont jamais été aussi longues depuis le massacre du Krokus et surtout depuis que le grand Volodomyr Z. a lancé son opération de Koursk, son plan génial pour vaincre la Russie (voir cet article-ci). L’argent est le nerf de la guerre et le Kremlin n’oublie pas cet adage. Mais à l’épreuve du feu, l’argent seul n’a jamais été une motivation suffisante. Un bon exemple de ce fait est la diminution en chute libre du nombre de mercenaires étrangers que parvient à embaucher l’armée ukrainienne : ceux-ci ont une tendance invincible à prendre la poudre d’escampette une fois qu’ils ont compris qu’ils n’étaient pas là pour participer à une sorte de safari, comme en Irak, en Afghanistan ou en Lybie, qu’ils avaient toutes les chances de ne pas revenir (les mercenaires n’étant pas protégés par les conventions de Genève, l’armée russe par une coïncidence étrange ne fait pas de prisonniers parmi les mercenaires étrangers, que ce soient des Polonais, Colombiens, Anglais, Tchèques, Norvégiens, Français, Baltes, Japonais, Tchétchènes ou même Biélorusses, peu importe ; je n’ai en effet pas pu voir un seul prisonnier étranger** en Russie, non-ukrainien, malgré les innombrables vidéos postées sur le sujet depuis le début de la guerre ; les seuls encore en vie au moment de leur capture semblent avoir brutalement décédés quelques minutes ou quelques heures après pour des raisons peu mystérieuses).

En guise de conclusion morale, on peut dire que l’argent n’a bonne odeur que tant qu’on n’a pas senti celle de la mort, tout près de soi, ou mieux encore, sur soi.

 

*Propos attribué à Bismark qui fut longtemps ambassadeur en Russie.

** En fait j'en ai bien vu un ou deux passant devant le juge en Russie mais on est très loin du compte (note de 2025)


dimanche 18 août 2024

Kursk : l'Opération Euh... de Volodomyr Z, son coup de génie testamentaire

Colorée en bleu: "positions" ukrainienne,vers le 10/08; en rouge: position armée russe; cercle blanc: centrale nucléaire de Koursk


    Encore un coup de génie de ce genre et il n’y aura plus d’armée ukrainienne.
    Cet article est pour ainsi dire la continuation logique de mon précédent sur le même sujet (voir ici) où je me demandais ce que les Otasuniens allaient nous concocter dans leur guerre par proxy contre la Russie : des négociations imminentes ou la guerre éternelle. Eh bien, l’option A vient d’être repoussée aux calendes grecques. 
    Néanmoins, l’option B n’est pas envisageable. Si le but avait été d’accélérer l’éradication des dernières forces vives de l’armée kiévienne, je ne vois pas ce que les Otasuniens auraient pu décider de mieux, mis à part peut-être attaquer de nouveau la Crimée avec fanfares, fantassins et matériels lourds. Pour un bénéfice très faible et de courte durée, et pour la joie extatique (mais également de courte durée) des commentateurs encartés à Télé Propaganda, l’Etat-Major russe tout ébaubi de sa chance incroyable est en train d’assister (dans tous les sens du terme) à la destruction minutieuse et méthodique des plus beaux fleurons de l’armée ennemie : soldats d’élite, Himars, tanks Challenger ou Leopard (c’était donc pour ça qu’ils les réservaient !), systèmes Patriot, Iris-T, des milliards qui partent en fumée chaque jour. J’ai lu quelque part (oui, je lis aussi) que c’était un vrai bonheur pour l’Occident de voir cette opération si bien menée, de main de maître, si bien combinée avec tous ces commandos surentraînés, tous ces blindés dernier cri, tous ces canons, tous ces missiles, tous ces drones, tous ces satellites pareils à l’œil du Mordor filant dans l’espace inaccessible. Et c’est vrai qu’ils ont envoyé tout le gratin de l’armée, tout l’équipement high-teck : Hourah ! Quel spectacle ! Quelle réussite ! Bravo ! Les Russes qui se donnaient tant de mal ces derniers mois pour aller chercher les soldats ukrainiens au fond de leurs trous, pour repérer les armements de prix de l’Otasunie le long de ce front immense, ont vu soudain tout cela débouler dans leur cour, sous leurs yeux ébahis, pour leur servir de cible à peu près aussi facile que dans un ball-trap.
    Ah oui, ils ont été surpris, les Russes : quelle créativité tout de même chez ces Otasuniens ! La population du sud de la région de Koursk n’a pas autant apprécié l’insouciance des autorités, quelque peu répréhensible de leur point de vue et on les comprends bien. Mais mettez-vous aussi à la place d’un général, d’un maréchal, des gens qui sont rarement réputés pour être de grands sentimentaux : quelle aubaine incroyable ! quel cas de figure idéal ! On vous rassemble ici dans un petit périmètre, essentiellement composés de forêts, de marécages et de minuscules villages, donc relativement désert, toute la crème de l’armée mercenaire pour être détruite ou au mieux emmenée pour exhibition à Moscou. Mettez vous à leur place aussi. Ils cachent leur joie en public, certes, par décence, mais ils sabrent le champagne dès qu’ils ont fermé la porte de leur casemate.
    On me dit qu’il y avait bien un but stratégique à cette Opération Euh*. Ou peut-être deux. Ou même trois (ça dépend des jours). Examinons ça. Le premier aurait été de divertir (dans tous les sens, je crois) les forces russes occupées alors comme aujourd’hui à décimer au sens moderne du terme les mercenaires otasuniens du côté du Donbass. Est-ce possible ? Il y a un point sur lequel au moins l’OTAN a incontestablement une supériorité et c’est le renseignement aérien, satellitaire. Ils savent que l’armée russe a des centaines de milliers d’hommes en réserve, prêt au combat, dans la région de l’Ukraine ou pas très loin et ils auraient eu l’idée fantastique que l’envoi de quelques milliers de soldats en excursion vers Koursk allait forcer l’Etat-Major adverse à dépeupler le front du Donbass ? Pour défendre dix village et une bourgade de cinq mille habitants qui avaient de toute façon pour la plupart déserté le coin bien avant ? Non, pour croire ça, il faudrait admettre que les chefs militaires otasuniens vivent eux aussi dans la Matrice, dans un univers virtuel, et je ne le crois pas. La guerre a tendance à vous remettre les idées en place si vous ne les avez plus, à vous mettre dans le concret pour ne pas dire un vilain mot, au ras des pâquerettes, quand il reste des pâquerettes. Le second objectif invoqué serait de s’emparer de la centrale nucléaire de Koursk (en fait située à l’ouest de Koursk, effectivement dans la direction prise par les forces otasuniennes au tout début de l’Opération, voir la carte ci-dessus) afin de procurer à l’état mercenaire de Kiev un meilleur rapport de force dans l’optique de négociations futures. J’aurais tendance à le croire davantage en effet, faute de meilleures explications. Mais alors imaginons que la bande de mercenaires payés et armés par nos pays ait capturé la centrale : c’était quoi la suite du scénario ? Un chantage à base de nucléaire ? Dangereux, non ? Peut-être même cinglé, digne du cerveau du docteur Folamour !?
    Bon, je n’ai pas parlé de l’objectif numéro 3 parce qu’il tient plus de la fantaisie hollywoodienne, matrixienne en fait, totalement découplée de la réalité : renverser (encore !) Poutine en montrant à son bon peuple quel incapable il est en plus d’être un voleur d’enfants (hé oui, c’est le chef d’inculpation officiel qu'on lui a trouvé).
Reste enfin l’objectif le plus probable et de loin, qui lui n’a rien de stratégique, jamais avoué mais toujours présent : faire la une des journaux, des radios, des télés, durant quelques jours, quelques semaines, alimenter encore et toujours de ces données vérolées la machine énorme, dévoreuse d’âmes, la Matrice.
    Cet épisode estival me conforte dans l’idée que nos gouvernants, ou les oligarques qui les possèdent, ne sont en-dessous de rien. Eux aussi sont clairement dans la Matrice. Et dans la Matrice, on ne craint rien bien sûr puisqu’on sait que tout peut être arrangé par un agent Smith. Le problème c’est que la guerre nucléaire, elle, sera bien réelle.
    Décidément, les étés sont terribles pour Zelensky, sa bande grassement payée de mercenaires et l’armée de zombies qu’ils envoient manu militari — c’est le cas de le dire — au casse-pipe. Après la contre-offensive de l’an passé, on a droit à l’offensive de Koursk, qui, je le prédis sans grand risque, ne finira pas mieux et probablement pire.

    Je vais maintenant devoir faire un effort considérable -- délice masochiste dont on doit se garder d'abuser -- pour me mettre dans le cerveau de l’Etat-major de Kiev, en supposant que l’Ukraine soit un état souverain et que cet Etat-major ait gardé de la compétence, ce qui est beaucoup supposer, puisque la corruption, le seul fait d’être payé par une puissance étrangère vous ôte la possibilité même de la compétence. Mais essayons quand même. Réfléchissons sérieusement une minute, ou deux peut-être, à ce que notre Etat-Major devrait avoir pour objectif vu la situation sur le terrain et les forces en présence. 
    Les forces russes ont annoncé qu’elles pratiquaient une guerre d’attrition, qui consiste à privilégier la destruction de l’armée ennemie (hommes et équipements, usines militaires, infrastructures pouvant servir à la logistique, etc.) sur le gain de territoires. Et c’est bien ce que nous observons : elle fait ce qu’elle dit. Les petits gains territoriaux réguliers que les forces ennemies, les orcs, obtiennent dans le Donbass sont pour ainsi dire des effets secondaires de leur médication : forcément quand il n’y a plus d’adversaire en face de vous, il faut bien avancer pour continuer les opérations d’attrition. Et pourquoi les Russes ont-ils choisi l’attrition (après une brève mais fructueuse guerre de manœuvre au tout début de l’Opération Militaire Spéciale) ? Parce qu’ils sont sûrs de la gagner et que cela économise en même temps leurs propres forces. Vous ne pouvez gagner une guerre d’attrition contre un adversaire possédant une population beaucoup plus grande, une puissance logistique supérieure qui découle d’une industrie militaire et d’une industrie tout court plus élevée d’un ordre de magnitude. C’est impossible. Même avec toute l’aide de l’OTAN, même si l’OTAN nous envoyait tout le nec plus ultra de ses armements merveilleux, cela resterait impossible. Stratégiquement, nous avons déjà perdu la guerre. Nous, l’Etat-major ukrainien le savons, même si nous sommes corrompus, même si nous sommes incompétents. L’Etat-major de l’Otan le sait lui aussi même s’il est corrompu, même s’il est incompétent. Les idiots de l’UE ou de Washington l’ignorent peut-être, ils vivent dans la Matrice, mais nous, militaires, nous le savons. Nous devrions donc adopter une stratégie adaptée, visant à ne jamais mettre notre armée en position où la guerre d’attrition que mène l’adversaire — qui est du genre méthodique et minutieux — est facilitée. En gros, nous devrions nous abstenir de toute opération offensive d’importance. Si vous attaquez, vous sortez de votre zone de sécurité, de vos fortifications, vous vous exposez, vous faites le jeu de votre adversaire qui n’attend que ça. (Je ne suis pas en train de sous-entendre que L’offensive de Koursk est un piège tendu par les Russes — c’est impossible en la circonstance, pour des raisons politiques (et non militaires) — mais que l’Etat-major russe a bien vu et saisi une opportunité encore plus belle que les précédentes). Nous savons aussi, pour les mêmes raisons indiquées plus haut, que nous ne reprendrons ni la Crimée ni les quatre oblasts réclamés par Moscou. C’est impossible, militairement et politiquement. La bonne stratégie pour nous est donc de nous efforcer de conserver le maximum de ce qui peut l’être encore, à savoir, pourquoi pas toute l’Ukraine hormis les cinq régions citées. C’est le mieux que nous pouvons espérer. 
    Je suis d’accord (sans surprise) avec tout ce qui vient d’être dit par nos grands chefs ukrainiens. On peut penser en effet que la Russie s’arrêtera si ses objectifs territoriaux annoncés sont remplis. Je doute beaucoup que les Russes aient envie de continuer la guerre ‘éternelle’ promise par certains occidentaux tranquillement assis dans leur canapé. La bonne stratégie, pour l’Ukraine, est donc d’économiser au maximum ses forces, ses meilleures unités, ses meilleures armes en se retranchant et en reculant petit à petit, car ce recul progressif est inévitable dans cette guerre d’attrition déséquilibrée, de façon à garder au maximum un pouvoir de dissuasion, c’est-à-dire la capacité de faire passer l’envie à l’ennemi de continuer le combat. Je suis convaincu que si l’Ukraine faisait cela, et elle le fait par séquences, mais sans esprit de suite, la Russie serait beaucoup plus encline à négocier et à se contenter si on ose dire des quatre régions déjà citées en matière de gains territoriaux.
    Mais voilà dans l’ensemble, l’armée ukrainienne fait tout le contraire. Sans doute qu’il est très difficile de se résigner à une stratégie perdante. Mais il est clair qu’on a ici d’autres raisons bien plus sinistres, à chercher du côté de l’argent. Quand votre fortune dépend de continuer une action, même désastreuse sur un plan collectif, et que avez perdu tout sens moral, on veille à la faire perdurer. Par ses actions inconsidérées, insensées du point de vue militaire, visiblement des opérations comm’, elle ne fait que hâter l’attrition, elle ne fait que hâter sa propre fin : la vraie, cette fois, où il ne reste plus qu’un champ de ruines autour de soi et une signature à apposer au bas d’un document qui porte en haut le très gros mot de reddition.
    L’Ukraine gaspille ses chances les unes après les autres de se conserver un futur, plus modeste dans ses limites certes, mais enfin un futur. Et plus elle s’enferre dans des buts inaccessibles, plus elle perd. Elle le sait. Il est impossible que L’Etat-major à Kiev (ou ailleurs, dans quelque bunker profondément enterré) ne le sache pas. Mais elle est tellement corrompue, tellement pourrie que ce savoir n’a plus aucune importance. Ses maîtres tout aussi corrompus n’ont aucun intérêt pour elle, juste le mépris habituel d’un pourri envers un autre pourri : ils la pousseront toujours plus loin, toujours en avant, mais ils ne la sauveront pas quand la fin arrivera. Oh non, ils n’enverront pas des troupes par centaines de milliers pour la sauver : ils ont trop bien vu ce qui est arrivé aux soldats ukrainiens : les champs de tombe dans le pays, à perte de vue, ça n’est pas une bonne comm’, hein ? Et c’est difficile à cacher, même pour tous les agents Smith de ce monde.


*L'opération Euh et autres aventures de Chourik est un des films russes comiques les plus populaires, facile à trouver, même avec sous-titres français, ici, par exemple. 

 

dimanche 4 août 2024

La septième merveille de Russie : la cathédrale de fer

    J’ai placé cette vidéo avant le corps de mon article car j’aimerais que vous la visionniez en totalité — dix petites minutes — avant de revenir ici. Mieux vaut en effet en savoir le moins possible sur le sujet pour en apprécier la beauté. Moins il y a de préjugés, plus l’impression est grande. La vidéo ne pouvant s'imbriquer dans Blogger (choix du propriétaire), je vous invite donc à la regarder sur Youtube, à l'adresse indiquée ci-dessous:

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https://www.youtube.com/watch?v=3sHavfEbzcc

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Bien, vous avez fait la visite grâce à nos deux guides d’occasion et vous savez maintenant à peu près de quoi il est question, même si vous n’êtes pas très fort en langues étrangères. Vérifions.
    La cathédrale de la Résurrection du Christ de Kubinka, village dans la région de Moscou, a été inaugurée en 2020, il y a donc seulement quatre ans. Ce qui me frappe plus que tout autre chose, y compris sa splendeur externe et interne, est précisément le fait de sa contemporanéité. L’esprit qui l’habite et qui a présidé à sa construction me rappelle de façon saisissante l’esprit qui se dégageait (et qui se dégage encore, parfois, si on arrive à faire abstraction de tout le reste) des grandes réalisations architecturales d’inspiration chrétienne du Moyen-âge, tout particulièrement en France. Les différences entre l’architecture orthodoxe et l’architecture gothique sont nombreuses dans la forme mais l’esprit général est très proche (c’est vrai en fait de la plupart des architectures sacrées) : une communion des savoirs et de l’excellence, une émulation des talents, où tous, architectes, ingénieurs, tailleurs de pierre, charpentiers, maîtres verriers, sculpteurs, peintres, fondeurs de cloches et dans ce cas, dans le rôle des principaux solistes, les métallurgistes, sont déterminés à donner le meilleur de ce qu’ils savent faire dans le cadre d’une réalisation unique et monumentale, destinée à demeurer longtemps dans la mémoire des hommes. Bien sûr, ce genre d’édifices grandioses et ‘inutiles’ coûte très cher mais ce n’est pas une raison pour s’en priver. D’une certaine manière, cela agit sur l’esprit humain comme les fusées qui vont sur la Lune ou sur Mars : ça n’a pas d’utilité pour la science et pourtant cela en vaut la peine. L’Homme ne vit pas que de pain, a dit quelqu’un. Et croire que la construction d’un tel monument ou le lancement de la mission Apollo a été un fardeau financier pour les Russes comme pour les Étasuniens serait une forme d’œillère où l’on ne voit que la colonne dépense. Souvent, on entend dire que ces monuments grandioses sont des vanités de rois, de pharaons, de tsars, égoïstement destinés à entretenir leur légende dorée et que tout cela finira dans le sable comme Ozymandias. Peut-être. Quelquefois sûrement. Peut-être qu’ils croyaient se bâtir une statue, les Ramsès, Périclès, Artaxerxés. Mais alors ils se trompaient. La véritable fonction de ces œuvres démesurées, quand elles sont réussies, est de montrer de la façon la plus concrète et la plus saisissante qu’il existe en ce monde quelque chose de bien plus grand que l’Homme, que l’Homme n’est pas la mesure de toutes choses, qu’il soit roi ou simple ouvrier.
    Sur le plan simplement architectural, je note que cette basilique sort des sentiers battus par les architectes ‘orthodoxes’. Les Russes, comme les orientaux en général, ont tendance à privilégier les formes arrondies sur les angles contondants, les arabesques sur les droites et les pointes. Ils ont aussi un goût presque excessif (à mes yeux du moins) pour les dorures, les émaux, les couleurs vives et claires. Je vous épargne ici une longue thèse de doctorat sur le lien entre l’hiver russe, long et gris, ou blanc, et cette prodigalité de couleurs, de brillance et de lumière. Mais comme on peut le constater dans le cas de cette nouvelle cathédrale, les matériaux ont été choisis dans des teintes particulièrement sombres, qui évoquent (et parfois sont) le basalte, le schiste vert, le marbre noir, le bronze et l’acier passé à la flamme. Dans ce paysage enneigé, le contraste est particulièrement saisissant et, je trouve, émouvant (d’une manière générale, l’architecture russe est encore plus émouvante par ces météos hivernales).
    Les métaux, de façon également très inhabituelle, ont été employés en placages sur les murs extérieurs ou pour d’autres ornementations architecturales, y compris le bas-relief central, d’or pur dirait-on, représentant le Christ : il s’agit là d’une vraie originalité puisque le travail du métal, l’art de la ferronnerie sont rarement utilisés à cette fin, si ce n’est pour produire quelque figure sommitale anecdotique, qui dans un certain pays non imaginaire peut prendre l’apparence d’un coq.
    Le métal est d’ailleurs le lien principal entre l’extérieur et l’intérieur radicalement opposés de la construction, que ce soit le fer, le bronze ou le cuivre aux reflets verts. Le vert est d’ailleurs la teinte dominante de l’édifice, plus encore que le noir. Autant l’apparence extérieure est sombre, froide, sévère, funèbre même, presque hostile et barbelée, autant l’intérieur est clair, coloré, doré, joyeux, inondé de lumières naturelles et artificielles. On pourrait ajouter en caricaturant un peu que ce contraste entre extérieur froid et dur et intérieur plus chaleureux décrit bien aussi l’homme russe (c’est moins vrai pour les femmes, qui ici comme ailleurs, ont une tendance à la sociabilité plus développée, ce qui implique généralement de sourire). Seul le pavement de métal sombre, très beau d’ailleurs, et pas seulement pour le contraste, rappelle l’extérieur. Comme le précisent nos guides, ce curieux carrelage a été réalisé en fondant une partie des innombrables trophées de guerre issus des années 1941-45, divers armements de la Wehrmacht, en particulier les blindés avec ses tonnes de ferraille. Voilà une utilisation joliment ingénieuse, esthétique et opportune des présents involontaires laissés par l’ennemi.
    Admettons-le si ce n’est pas déjà fait, je suis particulièrement sensible à l’architecture de cette cathédrale, par son contraste puissant entre l’apparence extérieure très sombre et très dure avec l’intérieur tellement plus clair, plus doux et chaleureux. Cette balance, que l’on retrouve d’une autre manière dans l’architecture gothique française, par son mélange d’ombre et de lumière (avec toutefois un net avantage pour cette première) me séduit par sa beauté mais aussi par sa vérité métaphorique de la vie et de la psyché humaine. En Russie, ce mélange d’ombre et de lumière, du jour et de la nuit est rare. Les architectes russes privilégient très nettement la lumière sur l’ombre, le connu sur l’inconnu, le connaissable sur l’inconnaissable, le réel sur l’irréel, à l’image de Tolstoï, l’écrivain le plus typique de ce pays avec son ambition forcenée d’éliminer le moindre coin d’ombre de la création ; eh bien ce n’est pas le cas ici.
    Bien sûr, il faudrait être particulièrement bouché pour ne pas percevoir le symbolisme de cette architecture, sans même parler des peintures et mosaïques. Il s’agit de la cathédrale consacrée aux forces armées, en premier lieu donc à l’armée soviétique, l’armée rouge, celle qui a payé si chèrement sa victoire contre le troisième Reich. Cette idée peut choquer dans un cadre religieux, plus spécialement chrétien. Il faut alors comprendre que le sens profond de cette construction est littéralement inscrit sur la façade de son portique d'entrée (qui sert de clocher) : « Nul n’est oublié, rien n’est oublié ». La cathédrale de la Résurrection est donc littéralement un monument aux morts géant, à mon avis d’une splendeur extraordinaire, comme il n’en existe nulle part ailleurs. C’est un hommage à tous les soldats inconnus mais aussi à tous les autres, hommes, femmes, enfants qui n’ont pas de fleur ni de plaque ni de nom sur leur tombe de cendre et de terre. Et il y en beaucoup : rappelons que les morts lors de la seconde guerre mondiale pour l’Union Soviétique seule sont estimés actuellement à vingt-sept millions. Imaginez : un sixième de la population disparue en cinq ans, auquel il faut ajouter les innombrables blessés, infirmes pour la vie. C’est bien plus qu’une décimation.
    Le fait est là : la guerre a été et est toujours une source d’inspiration majeure pour les Russes, écrivains, peintres, musiciens, architectes. Mais ce n’est pas un choix de leur part. Je crois pouvoir assurer sans me tromper qu’ils auraient préféré mille fois ne pas être la cible principale des grands massacreurs en chef, Napoléon, Hitler et ces Otasuniens de malheur. Mais il y a un bon côté dans toute chose. Citez-moi un seul monument de ce calibre, un seul édifice architectural mémorable que la France, que l’Occident dans son ensemble, aurait créé depuis 1945. Vous pouvez essayer mais vous risquez de me faire rire.
    En France, on peut dire que l’art, le grand art (j’excepte les arts « mineurs » comme la chanson, le ciné ou la BD) est mort en I945, à quelques très rares exceptions près (Messiaen, Dutilleux ont encore produit quelques chefs d’œuvre de musique ‘savante’ après). À une époque, le plus grand génie de la France ou plus justement de l’esprit français s’est incarné dans son architecture, que l’on pourrait qualifier de paysagère, non pas seulement dans ses édifices les plus imposants mais aussi et surtout dans ses réalisations les plus modestes, qu’elles aient été en pierre, en brique, en bois ou en torchis. Cette époque est terminée ; au mieux on refait maintenant ce qu’on a déjà fait, et en moins bien. En Russie, non seulement l’inspiration architecturale ne s’est pas tarie mais elle est repartie de plus belle.

Pour finir en beauté, quelques photos du site qui ne figurent pas dans cette courte vidéo.

Vue d'ensemble du site, en fin de construction, qui révèle les grandes verrières sur les toits



Autre vue aérienne montrant le plan en cercles imbriqués



Parvis: scultpture monumentale représentant une femme le visage dans les mains




Vue de face, plus impressionnant

samedi 18 mai 2024

L’art de la guerre illustré : la guerre en Ukraine.

Les drapeaux sont aux couleurs locales: ah! mais lesquelles?


    Ce qui s’appelait originellement Opération Militaire Spéciale est presque toujours mal compris en Occident, que ce soit à dessein ou par ignorance. L’idée qui traîne actuellement dans tous les cercles d’experts militaires occidentaux que l’armée russe s’est améliorée depuis février 2022 est vraie comme une vérité de la Palisse est vraie ; elle ne sert qu’à justifier leur fausse analyse antérieure que l’armée russe de 2022 était incompétente, pas motivée, sous-équipée, ou avec des équipements obsolètes. Cette grossière erreur d’analyse ou cette incompréhension totale est doublée d’une posture, d’un discours extraordinairement dangereux. 
    En guise de préambule, je donne ici quel est à mon avis le point crucial qu’a oublié ou que refuse de voir l’Occident. Je ne m’attarde pas sur le discours ukrainien, qui n’a pas vraiment d’importance, et qui est à mettre sur le compte de têtes brûlées qui n’ont rien à perdre, ayant de toute façon déjà entièrement ruiné le pays. Néanmoins, on aurait pu espérer de la part des responsables occidentaux, les montreurs de marionnettes, qu’ils fassent davantage preuve de lucidité et — justement — de responsabilité. Or, leur discours est incroyablement dangereux et irresponsable. Leur obstination à transformer ce conflit en combat entre le bien et le mal, en employant une posture morale et parfois eschatologique qui rappelle le discours israélien vis à vis de la Palestine et de ses voisins arabes en général, est périlleuse à l’extrême. Peu importe ce que vous pensez de la Russie, peu importe que ses raisons pour déclencher son Opération Militaire Spéciale vous paraissent bonnes ou mauvaises, il y a au minimum un point que vous ne devez jamais perdre de vue, pas une minute : la Russie est une puissance nucléaire et il est hors de question de rentrer directement dans un conflit avec elle quand vous êtes vous-même une puissance nucléaire. Il est à peu près certain — et il serait idiot au possible de vouloir absolument vérifier cette assertion — qu’une guerre ouverte entre l’OTAN et la Russie amènerait au final à une guerre nucléaire. Quand la Terre sera dévastée et invivable, cela nous fera une belle jambe de savoir que la « vertu » a gagné. Ce doit donc être un principe absolu dans la pensée stratégique de ceux qui nous gouvernent et malheureusement, on doit constater qu’il n’est pas compris par tout le monde… Pour le moment, l’irréparable n’a pas été commis et on peut se féliciter de la retenue dans les actes des deux camps. Les occidentaux évitent d’envoyer des armements trop dangereux à son proxy et de son côté la Russie feint de ne pas savoir que ce sont des awacs qui surveillent le ciel et fournissent tous les renseignements nécessaires à l’artillerie et aux lance-missiles ukrainiens pour cibler les forces russes, que ce sont des militaires occidentaux qui sont aux commandes des équipements les plus modernes (et les plus onéreux), que les soi-disant mercenaires sont en fait pour la majorité des conseillers militaires ou des spécialistes d’opérations spéciales venus des divers services occidentaux. Mais plus le temps passe et plus il devient clair que cette retenue de l’OTAN est plus liée à une impuissance qu’à un manque d’envie. Si de plus, jusqu’ici, les pays occidentaux croyaient que l’Ukraine pouvait triompher en solo avec leur aide, c’est maintenant terminé et il est évident que certains cherchent une méthode plus ou moins astucieuse pour faire rentrer aussi discrètement que possible l’OTAN sur le terrain, pour de vrai, sans plus se cacher. La constatation simple qu’ils ne peuvent vaincre la Russie sur son terrain par les méthodes conventionnelles ne semble pas pourvoir les dissuader. En effet, comment dans un combat entre le bien et le mal, l’ange d’Occident pourrait accepter de ne pas continuer à combattre le démon maléfique venu de l’Est ?
    Bien, passons maintenant aux faits et à la partie plus substantielle de ce conflit.
    Je vais ici essayer de décrire clairement ses phases successives, ses causes et ses conséquences très prévisibles — mais jamais certaines évidemment (l’art de la prévision est très difficile, surtout dans l’avenir, comme disait quelqu’un). N’étant pas un expert militaire, je me contenterai de décrire les grandes lignes des événements, grandes lignes qui apparaissent toujours avec le recul, même pour un œil non spécialiste, à condition d’avoir bien fait ses devoirs auparavant, ce qui est sans aucun doute mon cas. Après tout, il n’est pas nécessaire d’être grammairien diplômé de la Sorbonne pour reconnaître les propositions successives d’une phrase, ses articulations et sa signification générale.

    Tout d’abord, il est utile et en fait nécessaire de réaliser que la guerre n’a pas commencé en février 2022. Ce n’est pas une théorie, c’est un fait. Elle a commencé comme une guerre civile en 2014, entre Ukrainiens de l’ouest et Ukrainiens de l’Est pour faire simple. La cause est non moins certaine : le renversement du gouvernement de Yanoukovitch, élu aussi démocratiquement que ses distingués collègues d’Europe occidentale, un politicien modérément pro-russe, ce qui n’a rien d’une tare, et est même recommandé, surtout quand votre économie dépend plus qu’à moitié du commerce avec le grand voisin de l’Est. Sur l’opération « spéciale » de Washington consistant à apporter liberté et démocratie aux Ukrainiens selon ses méthodes habituelles, je vous recommande le très bon documentaire d’Oliver Stone sur ces événements bien documentés, dont j’ai oublié le titre mais vous le retrouverez facilement (« Ukraine on fire » ou quelque chose comme ça ; il existe en version française aussi, je crois). L’Ukraine est en effet un pays à peu près également partagé entre les russophiles et les russophobes. Il faut ajouter que les russophobes comme les russophiles ont un point commun : ils parlent tous russe. Les Ukrainiens parlant spontanément l’ukrainien sont à peu près aussi nombreux que les Bretons parlant breton.
    L’Ukraine a une caractéristique plus ennuyeuse dans le fait qu’elle présente la plus grande concentration de nazis au monde actuelle. Tout au plus pourrait-on distinguer entre les vrais nazis, disciples de Bandera, majoritairement issus de la région de Lvov, qui ont fini par former le bataillon d’Azov, et les fachos plus ordinaires de Right Sector, Kraken et autres milices paramilitaires qu’on peut trouver en revanche partout (à l’époque, c’étaient des paramilitaires, maintenant ce sont des militaires tout court : ils forment même l’épine dorsale de l’armée ukrainienne actuelle. Zalujny, l’ancien chef d’état-major de l’armée, avait (et a toujours, j'imagine) un buste de Bandera posé bien en évidence sur son bureau et un autre sous forme de poster plaqué dans son dos. Et naturellement les nazis font des trucs de nazi : à quoi s’attendre d’autre ? Aussi, suite au massacre de Maïdan, orchestré selon les principes éprouvés de la CIA, un simple hors d’œuvre, ils se promettaient de remettre de l’ordre dans tous les oblasts (régions de l’Ukraine) qui avaient la détestable habitude de voter à 90% pour les candidats russophiles et de vouloir parler leur langue maternelle où ça leur plait quand ça leur plait, le russe. Une politique de terreur et de ségrégation, digne de leurs modèles du troisième Reich, s’est alors mise en place dans tout le pays mais plus particulièrement à l’est.  Naturellement, quand vous déclarez à une grosse moitié de la population de votre pays que vous êtes des sous-citoyens, des sous-hommes, cela se passe mal. Des partisans très courageux (les premiers sont toujours les plus courageux, de très loin) ont décidé du côté de Donietsk et de Lougansk de sonner la révolte contre le gouvernement illégitime de Kiev, à peu près en même temps que la Crimée rejoignait la Russie. Vous vous demandez peut-être pourquoi les autorités de Kiev, menées par Porochenka et sa bande de mercenaires, n’ont pas bombardé alors la Crimée comme ils l’ont fait des oblasts de Donietsk et de Lougansk. Très simplement, parce que la Russie ne les aurait pas laissé faire et qu’ils pensaient à l’époque n’être pas prêts pour cette grande confrontation, inévitable. Poutine a dit que sa plus grande erreur était de ne pas être intervenu à ce moment-là en faveur des deux oblasts rebelles. Peut-être. On ne peut pas réécrire l’histoire. Peut-être aussi que la Russie n’était pas prête alors à affronter l’hydre à sept têtes (au moins) qui se cachait derrière le gouvernement mercenaire de Kiev, et en particulier l’ogre dévoreur d’enfants washingtonien. Quoiqu’il en soit, pas très fière d’elle, la Russie a laissé les nouvelles républiques de Donietsk et Lougansk se débrouiller seules contre le nouveau proxy otasunien. Tout au plus a-t-elle envoyé des armes, et pas des plus modernes, ainsi que quelques conseillers ou instructeurs, puisque les rebelles comptaient très peu de soldats de métier parmi leurs rangs. Jamais la Russie n’est intervenue directement dans le conflit entre 2014 et 2022. C’était de fait une guerre civile et aucun doute que cela le serait resté si le gouvernement fantoche de Zelenski, soutenu et encouragé financièrement, militairement, politiquement par Washington ne s’était pas senti pousser des ailes. Durant le laps de temps en effet, l’État-nation Ukraine était devenu l’instrument de prédilection de Washington et Zelenski sa marionnette des guignols préférée. Mais avec la manne venue de l’Ouest, ils avaient pu considérablement augmenter la taille de leur armée, bénéficier des bons conseils et autres supervisions otasuniennes, créer d’imposantes fortifications tout le long du front traversant les oblasts de Donietsk et Lougansk, et préparer en somme le terrain pour la guerre, la vraie, qui les opposerait à la Russie. Cat tel a toujours été le but de Washington : pousser la Russie à intervenir directement et lui casser les reins à la fois par la science militaire occidentale jugée très supérieure et par les sanctions économiques les plus dévastatrices jamais appliquées.
    Le souhait de Washington a finalement été exaucé en février 2022. Mais il faut remarquer que la Russie a traîné des pieds autant qu’il était humainement possible, cherchant une solution diplomatique, tandis que les enfants du Donbass se faisaient massacrer (ah, bien sûr, on ne vous en pas parlé à la radio-télé !). Combien de fois les diplomates et politiciens russes du plus haut niveau ont tenté d’obtenir un apaisement de la situation ? Dix fois ? Vingt fois ? Jusqu’à la fin ou presque, ils semblent y avoir cru, même après que les deux accords de Minsk aient été aussitôt bafoués par Kiev (et par ses généreux patrons occidentaux mais ça va sans dire). Disons-le clairement, Poutine a montré une grande frilosité ou une très grande prudence, choisissez le terme qui vous plaira. Mon impression est qu’il avait un gros doute, non sur la prépondérance de son armée face à l’ennemi, mais sur le niveau de résilience de l’économie russe face au déchaînement des sanctions qui ne manqueraient pas de leur tomber sur la tête. Finalement, quand il est devenu évident que Kiev était prête à liquider l’énorme ghetto qu’étaient devenus les deux oblasts tronqués de Donietsk et de Lougansk, ayant multiplié les bombardements par dix et ayant amené des troupes massives vers la ligne de front, il s’est résigné à donner le feu vert à l’armée pour intervenir et fait sa déclaration à la télé.
    Le premier plan des Russes, le plan A disons, était d’entrer très rapidement en Ukraine avec une force limitée, une grosse centaine de milliers de soldats, ce qui est très peu pour un pays de la taille de l’Ukraine (qui est, ou plutôt était, plus grand que la France, rappelons-le pour les prix Cécile Duflot de géographie). Cette force était jugée néanmoins suffisante pour atteindre les faubourgs de Kiev et d’autres grandes villes, Hrerson, Hrarkoff, Zaporodjié et mettre une telle pression sur le gouvernement ukrainien qu’il ne puisse faire autrement que venir à la table des négociations. Et ce plan a bien failli fonctionner. Il y a bien eu des négociations à Istamboul. Les propositions de la Russie, comparées à ce que peut espérer l’Ukraine aujourd’hui, étaient incroyablement généreuses : les Kiéviens gardaient l’intégralité de leur territoire, hormis la Crimée évidemment, sous condition de renoncer à leur politique de ségrégation antirusse, de renoncer à leur adhésion à l’OTAN, de se séparer des éléments nazis de leur armée et gouvernement. Les deux parties ont signé les premières moutures de l’accord de paix. Puis… Boris Johnson est arrivé. Bon, je n’étais pas là et je ne peux affirmer que le clown anglais est bien celui qui a tout fait capoter. Il y a tant de clowns qui se disputent la palme de l’absurde tragique aujourd’hui en Occident comme en Ukraine qu’il est difficile d’y voir clair sur qui prend réellement les décisions. Quoiqu’il en soit, le plan A des Russes a échoué in extremis. Je ne vois personnellement aucune erreur de l’État-major russe dans cet échec. Même s’il n’avait qu’une chance sur dix de réussir, il fallait commencer par là ; la possibilité d’épargner des centaines de milliers de vie humaines, d’éviter d’envoyer des millions de réfugiés dans la nature, sans parler des dégâts matériels colossaux, non seulement le justifiait mais l’exigeait. Cependant, ils ont probablement péché pour une fois par optimisme, faute rare chez les Russes, comme le montre leur relative lenteur à mettre sur pied une force beaucoup plus importante, nécessaire pour la phase qui allait suivre, la guerre d’attrition. (À ce sujet, on peut trouver étrange qu’un pays comme la Russie n’ait pas eu en réserve au moins une centaine de milliers de soldats, disponibles au pied levé, qui auraient permis de tenir Hrerson et la région de Hrarkoff. C’est bien sûr parce que ces réserves étaient déjà marquées pour une hypothétique attaque des Otasuniens, improbable certes mais que la Russie se devait, et se doit toujours, de considérer très sérieusement).
    Durant cette première phase de l’intervention russe, essentiellement couronnée de succès, il faut noter la rapidité stupéfiante avec laquelle les Russes ont pénétré en Ukraine, vraiment comme dans du beurre, prenant près d’un quart du pays en quelques jours. Pour une guerre de manœuvre, c’est un résultat d’autant plus impressionnant qu’à notre époque de satellites et de drones omniprésents — les Ukrainiens bénéficient à plein de l’ISR washingtonien — il est impossible en principe de bouger des troupes ou du matériel en masse sans que cela se sache. La seule manière d’expliquer la surprise et la déroute ukrainienne premières est leur conviction que l’armée russe attaquerait au Donbass. Et bien sûr qu’il y avait des forces massées à cet endroit, majoritairement les forces miliciennes de Donietsk et Lougansk, avec sans doute quelques brigades russes pour tromper l’observateur. Or, elle a attaqué partout sauf là, évitant les fortifications préparées longuement et amoureusement pour empaler l’envahisseur. Ils ont jailli simultanément de l’extrême sud et de l’extrême Nord, prenant complétement les forces ukrainiennes à revers. Certes, les Russes ont payé un prix pour cette avancée éclair mais comparé à ce qu’ils auraient payé en attaquant frontalement au Donbass, c’était presque une promenade de santé.
    Les Russes ne sont réellement passés au plan B qu’à la fin de l’été 2022. S’ils ont commis une erreur stratégique dans la conduite des opérations militaires, c’est là. On ne doit pas minimiser l’importance de cette erreur : elle a coûté et va continuer de coûter beaucoup de vie de soldats russes dans l’entreprise obligée de reconquête de ces territoires perdus puisqu’une partie se trouve dans l’oblast de Hrerson et une autre dans celui de Lougansk, territoires devenus russes depuis le referendum de septembre 2022. Entre-temps, après les accords avortés d’Istamboul au début du printemps, ils ont poursuivi le plan A et ont liquidé ou capturé le restant des nazis d’Azov, retranchés à Marioupol. C’est à ce moment précis qu’ils auraient dû enclencher le plan B, sachant maintenant que la guerre allait être totale. Mais ils ont tardé et la mobilisation partielle (très partielle) pour combler le déficit n’a débuté qu’en septembre. C’était trop tard. Les soldats ukrainiens étaient beaucoup plus nombreux et les Russes ont dû reculer, en bon ordre à Hrerson, en moins bon ordre à Hrarkoff. Dans ces opérations de reconquête relative, les Ukrainiens ont perdu un nombre ahurissant d’hommes, parmi leurs soldats d’élite, facteur qui a certainement contribué à l’échec de leur offensive de l’année suivante.
    Le plan B est donc décrit généralement par tous les observateurs, de quel camp que ce soit, comme une guerre d’attrition. La guerre d’attrition consiste à prioriser la destruction de l’ennemi, hommes et matériels, sur les gains territoriaux. Elle consiste aussi, bien sûr, à préserver au maximum ses propres troupes et matériels. Notez bien que c’est le plan de l’armée russe, certainement pas de l’armée ukrainienne, et encore moins de ses sponsors washingtoniens. Pour qu’une guerre d’attrition soit optimale, il est donc nécessaire de forcer l’ennemi à venir jouer sur votre terrain, ou tout au moins de l’y inciter. Défendre est normalement plus facile que d’attaquer, pour des raisons qui sont évidentes même pour un profane comme moi. L’armée qui attaque se découvre, en principe (on verra qu'on peut imaginer une exception à ce principe général), l’armée qui défend reste à l’abri de ses fortifications spécialement conçues à cet effet. C’est d’autant plus vrai si vous bénéficiez d’une puissance de feu supérieure, ce qui est indiscutablement le cas de l’armée russe. Au mieux de sa forme, au tout début de sa « fameuse » contre-offensive, et après avoir reçu les stocks de l’OTAN, l’Ukraine était peut-être à égalité en termes de munitions tirées par jour. Cette période de toute façon s’est très vite terminée. À partir de l’automne 2022 et jusqu’au début de l’automne suivant, l’armée russe n’a pas dérogé à cette stratégie. Et elle s’est avérée absolument dévastatrice pour l’adversaire. Pourquoi pensez-vous qu’il y a tant de discussions en cours en Ukraine pour mobiliser une nouvelle armée ou dans nos pays fantoches pour envoyer des troupes au sol ? La réponse est très simple : l’armée ukrainienne est devenue une estropiée, boitillant péniblement de ci de là pour maintenir un semblant d’illusion : il faut bien, sinon c’est la débandade complète. Tout le monde le sait. Là-haut. Mais vous, petit homme, vous n’êtes pas censé le savoir. Alors on continue de vous endormir avec des fables pour enfants de cinq ans. Bon, si vous préférez les contes pour enfant de cinq ans, c’est votre droit.

    Le succès total de cette phase de la guerre, vu de Russie, a été grandement facilité par la propension du gouvernement ukrainien à commettre encore et encore deux erreurs. La première est de vouloir passer à l’offensive quand la raison aurait dû lui dicter de préparer sa défense. Cela ressemble au joueur d’échec qui pense compenser la perte de ses pièces en se lançant dans des attaques tous azimuts ; bien sûr, le résultat le plus probable est qu’il va seulement parvenir à augmenter ses pertes relativement à celles de l’adversaire. La seconde est de vouloir coûte que coûte (on sait qui adore cette expression) s’accrocher à chaque miette de territoire, même pour des positions clairement désavantageuses, et ceci, presque jusqu’au dernier homme. Ah vous connaissez la formule favorite des politiciens de Washington : « combattez mes braves, combattez, jusqu’au dernier des Ukrainiens ! » Ces gens sont de grands philanthropes. Naturellement, si les chefs ukrainiens sont en réalité des mercenaires à la solde d'autrui et pour la plupart des crapules pendables, ils ne sont en revanche pas tous bêtes. Ils savent, au moins pour les plus éclairés — catégorie dans laquelle on ne peut ranger le Pinocchio vert de gris — que c’est une stratégie perdante. Perdante pour l’armée, pour le pays, pour la société ou ce qu’il en reste, mais pas pour eux. Ils ont parfaitement compris qu’ils devaient sans cesse alimenter l’espoir et l’illusion chez leurs grands amis de l’Ouest s’ils voulaient continuer à percevoir la manne sonnante et trébuchante en exécutant ces véritables opérations de communication, aux conséquences désastreuses pour leurs soldats. Et donc ils continuent. Même aujourd’hui dans l’état de délabrement pitoyable auquel sont arrivés l’armée ukrainienne et le pays tout entier, vous pouvez les entendre parler de repasser à l’offensive… en 2025… 2026… 2027… Ah mais attendez, Macron va envoyer ses soldats, sa grande armée napoléonienne d’au moins… une brigade. Quelle farce ! Sinistre farce !
    Ce choix très délibéré et maintes fois répété par l’état-major russe a donc été grandement favorisé par la stratégie otanukrainienne, en parfaite correspondance avec ce plan qui était : reprendre chaque mètre carré saisi par l’adversaire, y compris la totalité du Donbass, y compris et surtout la Crimée. En fait, les loyaux serviteurs ont été plus royalistes que le roi washingtonien, qui apparemment, se serait volontiers contenté de la Crimée. L’obsession des sponsors anglo-saxons en particulier à vouloir reprendre la Crimée reste quelque peu un mystère à mes yeux, à moins bien sûr qu’ils ne veuillent passer leurs prochaines vacances là-bas, mais en tout cas, cela convenait parfaitement à l’armée russe qui avait bâti sa plus formidable ligne de défense précisément pour en interdire l’accès, la maintenant célèbre ligne Sourovikine. On se rappelle du cimetière de blindés occidentaux à Rabotina. On se souvient comme les cimetières d’hommes ont soudain fleuri jaune et bleu dans toute la nation kiévienne. Quelle réussite, entièrement payée, conçue et pilotée par nos experts militaires : une gloire immense de plus à leur actif !
    Cette guerre par attrition imposait d’autres choix très logiques à l’état-major russe, qui ont souvent laissé perplexes ou critiques les observateurs pro-russes, bien à tort. Pourquoi ne pas avoir coupé les ponts du Dniepr dès le début des hostilités ? Pourquoi avoir attendu ce printemps pour détruire les centrales énergétiques du régime kiévien, hors centrales nucléaires (seuls les kiéviens sont assez irresponsables pour bombarder une centrale nucléaire, même à l’arrêt, comme celle de Zaporojié) ? Eh bien pour laisser venir l’armée kiévienne encore et encore, avec leur matériel lourd, là où les Russes ont leurs lignes de défense préparées, très à l’est du pays et donc bien plus favorable pour des questions évidentes de raccourcissement logistique. De même, il ne fallait surtout pas paralyser le pays en détruisant ses centrales énergétiques tant que l’opération d’attrition était en cours, de façon à ce que l’armée kiévienne reste aussi mobile que possible, toujours dans le même dessein. À dire vrai, il y avait aussi un autre motif à l’époque, humanitaire, qui était de limiter la souffrance du peuple civil ukrainien. Mais je crains bien que ces gentillesses ne soient plus de mise. Enfin, on peut signaler que le fait d’obliger l’armée kiévienne à venir affronter les Russes le long d’une ligne à peu près immuable a concentré les destructions sur une relativement faible portion du pays et donc préservé le reste. Je crois que c’était à un moment un objectif de l’état-major russe ; il est probable que ce n’en est plus un aujourd’hui et que la Russie a intégré le fait qu’elle devra reconstruire la majeure part des nouveaux territoires conquis.
    En fait, la guerre par attrition choisie par la Russie pour éliminer le danger ukrainien ne devrait pas surprendre puisque c’est en quelque sorte la spécialité incontestée de ce pays depuis des siècles. Les grandes manœuvres style blitzkriegs sont des exceptions dans son histoire et quand elles ont eu lieu, c’est toujours après une longue période d’attrition de l’adversaire. C’est probablement une des raisons pourquoi les Kiéviens ont été si décontenancés dans les premiers jours de l’Opération Militaire Spéciale par ce déploiement éclair en dehors de toutes les bonnes traditions locales. À la fin de la phase II, en octobre 2023, lorsque la Russie est passée à ce qu’elle appelle une « défense active », on peut estimer que l’essentiel était fait et que la suite des opérations ne ferait qu’officialiser ce qui était déjà patent : la défaite militaire de Kiev et de ses généreux patrons occidentaux. Pourquoi ? La colonne vertébrale de l’armée kiévienne est largement détruite avec la perte de ses soldats les plus chevronnés, ce qui ne peut être remplacé ni à court ni à moyen terme — les seuls termes envisageables pour une armée en perdition — l’assèchement très net des stocks d’armes disponibles chez ses généreux patrons et enfin la production d’armes et de munitions occidentale clairement incapable de suivre le rythme en accélération constante de sa contrepartie russe. Quand on connaît l’état industriel des pays occidentaux, y compris l’Allemagne, y compris les USA, et quand on regarde de l’autre côté la croissance industrielle de la Russie depuis au moins une décennie, ça n’a rien d’une surprise. Les occidentaux ont bu goulûment et avidement leur propre breuvage empoisonné, leurs propres mensonges, leur propagande absurde sur l’impotente Russie au PIB digne de l’Espagne (voir mon article précédent à ce sujet*)!
    La phase III, celle de la "défense active" a donc commencé officiellement en octobre 2023, après les fortes éclaircies dues à sa stratégie précédente. Disons que l’état-major russe a senti que l’adversaire était mûr, prêt à être cueilli. C’est alors qu’elle est partie à l’assaut du bastion cru imprenable d’Adviievka. On pourra remarquer à juste titre qu’elle avait déjà fait de même l’an précédent avec Bahrmout, au beau milieu de sa stratégie d’attrition ; soit on mettra ça sur le compte des exceptions inévitables dues à la mentalité russe, soit sur le fait qu’une opération isolée n’engage pas la stratégie globale, soit sur une erreur d’analyse de l’essayiste. Pour défendre celui-ci (si besoin était), j’invoquerai les mânes du disparu très peu regrettable Prigojin et du fait qu’il était ce qu’on appelle communément un électron libre, clairement rétif à toute stratégie venue de l’état-major. Mon idée sur la question est que si l’état-major avait été vraiment aux commandes de cette opération, et non les demi-mercenaires de Wagner, elle aurait pris un visage bien différent. De toute façon, l’opération d’Adviievka se distingue de celle de Bahrmout par le fait qu’elle a révélé pour la première fois depuis l’été 2022 l’intention de l’armée russe de pousser son avantage encore et toujours. Cette expression de « défense active » choisie par le ministère de la Défense russe, donc très officiellement, signifie que la stratégie de défense le long de lignes fortifiées à l’avance s’accompagne d’offensives limitées dans leur ampleur destinées à harceler l’adversaire, tout en conservant l’objectif prioritaire de l’attrition. Cette stratégie ne peut être payante dans le cadre d’une guerre d’attrition que si l’adversaire est déjà suffisamment affaibli, en particulier dans le secteur de sa défense anti-aérienne. Ceci permet en effet de faire intervenir beaucoup plus librement ses propres forces aériennes et réaliser par des bombardements massifs ce qui dans la phase précédente était réalisé par l’artillerie, les drones sur des unités en mouvement ; à savoir une destruction considérable des forces ennemis sans grand risque pour sa force aérienne et permettant d’attendrir suffisamment l’adversaire avant l’assaut des tranchées par les fantassins et blindés. Il y a toujours des pertes lors de l’assaut mais bien moindres que celles des défenseurs impuissants pris sous les bombardements massifs : on est bien donc toujours dans une stratégie d’attrition gagnante. De plus, les forces kiéviennes exsangues ayant par force dû se résigner à une stratégie défensive, il était devenu difficile de poursuivre cette attrition en attendant tranquillement l’ennemi dans les positions préférentielles russes.
    À la fin du dernier mois, ou peut-être même au tout début de mai — les sceptiques feront leurs propres recherches comme pour toutes les affirmations scandaleusement autoritaires contenues dans cet article — la Russie a annoncé officiellement quoique très discrètement par la voix du porte-parole des armées qu’elle était passée à la phase IV, l’offensive. Mon impression est que c’était déjà le cas depuis un petit moment. J’ai tâché de faire le compte des villages et villes (plus de 10 000 ha avant conflit) dont l’armée russe s’est emparée depuis la prise d’Adviievka à la mi-février jusqu’à la fin du mois d’avril, ce qui n’est pas si facile que ça en a l’air étant donné les va-et-vient inévitables et les désaccords entre observateurs du front (aussi bien russes qu’ukrainiens). Grosso modo, j’arrive à une vingtaine de villages et au moins trois villes prises, ce qui me paraît beaucoup pour de la « défense active ». C’est d’autant plus vrai que l’avancée russe à l’ouest d’Avdiievka a été de plusieurs dizaines de kilomètres. Quoiqu’il en soit, le nouveau terme « d’offensive » arrivé dans le lexique du très réservé Ministère de la Défense, est un signe annonciateur de gros orages à venir pour les pauvres diables poussés à la pointe de la baïonnette dans les tranchées kiéviennes par les mercenaires vert de gris de Zelenski. On imagine mal comment des missiles sol-sol ATACAMs ou des F16s si ceux-ci arrivent vraiment (c’est comme l’Arlésienne : on en parle sans cesse mais ils n’arrivent jamais) vont pouvoir leur éviter de se prendre sur la tête des pluies de bombes. Aux croque-morts : prévoyez donc 100 à 200 000 places de plus dans vos places de cimetière pour cette seule année et autant de jolis drapeaux bleus et jaunes.
    Une dernière remarque concernant cette nouvelle phase dite « offensive ». Autant que je puisse en juger, ces assauts sont toujours limités, utilisant relativement peu d’hommes et de matériels lourds, y compris dans la dernière poussée soi-disant de Hrarkov (je doute fort que cette ville soit la cible de l’opération), et je reste convaincu que le but premier de l’état-major russes reste encore et toujours l’attrition. Comme je l’ai expliqué, l’attrition se marie en général avec la défense et non l’attaque. Le fait que les Russes ont visiblement l’intention de réaliser dorénavant cette attrition par l’offensive est possiblement une innovation stratégique (à discuter avec des historiens militaires). Cette volonté est en tout cas en plein accord avec l’accent mis ces derniers jours par Poutine sur l’importance du développement qualitatif et quantitatif des drones et autres robots militaires. Si vous voulez attaquer sans trop risquer de pertes, on ne voit en effet pas de meilleur moyen qu’une armée de robots. Oh, ne vous attendez pas à Terminator, mais attendez-vous néanmoins dans un futur proche à observer la première bataille de robots et cette bataille-là ne peut être remportée que par le pays le plus industrialisé.

    J’en viens donc tout naturellement à la partie spéculative de mon essai, les stratégies prévisibles des deux camps pour le temps à venir : je m’accorde deux années de visibilité avant d’aborder l’inconnu insondable. Pour l’Otasunie, il s’agit essentiellement maintenant de masquer sa défaite par des actions de plus en plus inconsidérées à mesure que Moscou étrangle Kiev, des actions qui venant de tout autre pays moins vertueux et démocratiques seraient qualifiées de « terrorisme » mais que l’on préfère renommer comme des opérations asymétriques. Le dernier projet en date est de détruire le pont de Crimée (qui n’a guère d’importance militaire, l’armée russe ne l’utilisant plus), ce qui est presque bénin comparé à certains projets plus grandioses comme l’attaque encore et toujours de la centrale nucléaire de Zaporojié, la plus grande d’Europe dit-on. Mais même dans cette stratégie strangelovienne, les Otasuniens n’ont pas les meilleures cartes. L’an passé, les patrons de Washington ont escaladé d’un cran la confrontation en envoyant des bombes à sous-munitions à leurs sbires au trident, normalement proscrites selon les conventions internationales (mais les règles bien sûr ne sont pas faites pour Washington) ; résultat : les Russes ont répondu avec les leurs et ils en possèdent beaucoup plus. Le même résultat sera immanquablement atteint avec n’importe quel armement utilisé. Les Russes ont beaucoup plus de munitions de tous types et il est certain que cette différence ne fera que s’accroître dans les deux ans à venir. Si nos psychopathes en charge visent des cibles civiles, faute de pouvoir s’attaquer à des cibles militaires, s’ils passent par des groupuscules ou mercenaires exotiques comme cela a certainement été le cas pour le massacre du concert à Moscou, ils s’exposent à des représailles tout aussi « asymétriques ». La solution évidente serait d’entamer un véritable processus de négociations avec Moscou mais c’est justement ce qu’ils ne veulent absolument pas faire car ce serait, de fait, reconnaître leur défaite, étant donné que les termes seront dictés par le camp d’en face. La diabolisation à outrance, à toute outrance comme dirait le cavalier blanc, des Russes et de Poutine en particulier, rend la chose encore plus impossible sans perdre complètement la face. Ils se sont littéralement fait piéger par leur propre rhétorique, leur propre propagande. La vérité est qu’ils se trouvent dans la situation du général qui a coupé tous les ponts derrière lui pour obliger ses troupes à toujours avancer et qui fait maintenant face à un mur de feu, sans nulle part où se cacher.
    Les conséquences de ce conflit seront terribles pour l’Occident dans son ensemble et pire encore pour son maillon faible : l’Europe. Aux yeux du monde, du reste du monde, de la grande majorité globale, il va perdre toute crédibilité, toute légitimité, tout respect. Le mieux qu’on peut espérer après ces dernières atrocités (je compte Gaza dedans) est de finir assignés à résidence dans notre île de liberté et de démocratie jusqu’à notre décrépiscence ultime, tandis que les corbeaux et autres vautours se rapprocheront lentement en cercles de plus en plus étroits au-dessus de nos têtes.
    Pour la Russie, que les nouvelles frontières soient le long du Donbass ou le long du Dniepr à la fin de la guerre, le challenge sera la reconstruction et le poids qu’elle va faire peser sur son économie. Il n’est pas sûr, pour le moins, que les investisseurs se pressent au portillon, voyant l’étendue des dégâts et la perte démographique due à l’émigration massive de ces dernières années. Ce sera probablement long, probablement plus long que la reconstruction de l’Allemagne d’après-guerre, et se fera en plusieurs phases : la reconstruction des grandes infrastructures et des immeubles d’habitation, et seulement ensuite le redémarrage économique. En attendant, il est probable que la Russie va devoir sérieusement mettre la main à la poche pour faire vivre tous ces gens sans revenus bien établis. On peut supposer que le secteur agricole sera beaucoup plus prompt à repartir de l’avant, une fois que les champs auront été nettoyés de leurs divers engins d’artifice non récréative. On a eu la preuve que l’armée russe savait faire cela très vite, en particulier dans la région de Marioupol.
    Cependant, malgré les difficultés, cela se fera. La Russie a et aura encore plus dans les années à venir la puissance financière pour assurer le gros de la reconstruction. Actuellement, la Russie consacre autour de 6% de son PIB à la guerre (ce qui dans tous les cas n’est rien du tout comparé à une véritable « économie de guerre », contrairement aux affirmations des premiers prix Macron d’histoire et d’économie) ; eh bien elle consacrera cette somme à la reconstruction au lieu de la destruction. On peut aussi penser que le partenaire chinois sera intéressé à investir dans le projet « Nouvelle Russie » et peut-être même « Petite Russie » (c’était le nom de ces régions dans l’ancienne Russie), une fois le grand nettoyage et les principales infrastructures achevés. En fait, il n’est même pas évident que la Russie aura plus à payer que ce que l’Empire doit payer et va continuer de payer pour maintenir à flot le bateau fou et percé de toutes parts qu’est son proxy ukrainien. L’intégration des populations ne sera pas un gros problème : elles sont comme je l’ai dit très majoritairement russophiles et bien sûr russophones sans exception. On pourrait faire un parallèle avec les populations d’Allemagne de l’Est quand elles ont choisi de rejoindre la RFA. C’est d’autant plus tentant que les régions du Donbass, par faute d’investissement de la part de l’ex-nation souveraine d’Ukraine dans ces régions depuis 1991 sont très attachées sentimentalement à l’URSS ; tout ce qu’il y a encore de solide ici date en effet des soviétiques, ce qui rend les autochtones quelque peu nostalgiques de cette période. J’entends assez souvent des Russes s’étonner de l’atmosphère soviétique qui règne ici, comme si tout l’est (et le sud) de l’ex-Ukraine s’était figé dans le temps. Néanmoins, par comparaison avec la Crimée, qui était dans un cas similaire mais qui a de l’avance, on peut deviner que ces réticences fondront comme neige au soleil devant des retraites et des salaires plus élevés, une assurance sociale très généreuse (aussi généreuse en fait que celle qu’avaient les Français il y a trente ou quarante ans, en conjonction avec un système de santé très performant) des infrastructures neuves et surtout de vraies perspectives d’avenir. Et la Russie n’est pas la grosse dinde d’Allemagne, farcie par l’orifice habituel (je ne vous dirai pas par qui sauf que c’est un amateur de dindes et que son petit nom est Sam). Elle a un énorme potentiel qui va croissant ; investir n’est pas du tout un problème pour elle, c’est juste la question d’atteindre un degré d’attractivité suffisant car contrairement à ce que nos lavés du cerveau croient, ce n’est pas Poutine qui décide de tout en appuyant sur un bouton depuis son bureau du Kremlin. En appuyant sur un bouton, on peut éventuellement détruire un paquet de choses mais on ne peut rien construire.
    Le seul danger important qui guette dans les deux années à venir la Russie et le monde avec elle, n’est pas l’essor du terrorisme venu des restes fumant de l’Ukraine occidentale et occidentalisée, très prévisible en effet. Elle sait gérer comme on dit, elle a toute l’expérience qu’il faut : merci Washington, merci la CIA. En gros, elle saura faire passer le goût de ces aventures aux occidentaux et à Washington en particulier, au moins dans ses plates-bandes. Non, le danger est la prise de conscience actuelle de l’Occident de son incapacité à rivaliser avec la Russie dans le domaine des armements conventionnels. Le risque numéro 1, clairement identifié par les leaders russes, est donc la tentation pour quelques têtes brûlées occidentales (et ce n’est pas ça qui manque entre le derviche tourneur Macron, l’écervelée Von der Leyen et le sénile Biden, parfaitement mûr pour un second mandat selon les critères washingtoniens) d’utiliser des munitions nucléaires tactiques. Soyons clair, si Washington a la conviction qu’ils s’en tireront sans trop de dégât de leur côté, protégés des retombées par les deux océans, ils le feront, ou ils pousseront ces niais d'Européens à le faire pour eux. Et c’est pourquoi, très régulièrement, Poutine ou Shoïgou ou un autre doivent rappeler à ces irresponsables que la Russie est prête aussi pour ce genre d’actions et que leurs décisions auront des conséquences très désagréables pour tous les envoyeurs. D’après la plupart des gens mieux versés que moi dans cette matière, n’importe quelle munition nucléaire employée dans un conflit entre puissances nucléaires, même tactique (à faible rayon d’après ce que j’ai compris) entraînera fatalement une escalade menant à la guerre nucléaire totale.
    Pour finir par une note plus optimiste, raisonnablement optimiste, je dirai que la Russie, en payant beaucoup de sa personne, comme d’habitude, est en train de tracer la voie difficile et périlleuse qui nous éloigne de l’ancien monde, celui des empires hégémoniques, très belliqueux, ne supportant ni la contradiction ni la concurrence, pour aller vers le nouveau, beaucoup plus civilisé, mieux partagé, plus tolérant, plus divers. Oui, le monde est sur la bonne voie… tant que ça ne se termine pas en guerre nucléaire.

*Notons ce qui est tu soigneusement par nos grands et même petits médias : La Banque Mondiale, organisme peu susceptible de biais pro-russe, vient de faire paraître ses derniers calculs de PIB. Contrairement au FMI, elle recalcule tous les cinq ans les PIB nationaux en parité de pouvoir d'achat, estimant à juste titre que c'est beaucoup plus représentatif de la réalité d'une économie, bien que ça soit beaucoup plus compliqué et long à réaliser (d'où les cinq ans). Eh bien, ils se sont aperçus à New-York, oh surprise consternante, que la Russie était devenue la quatrième puissance mondiale économique mondiale, devant l'Allemagne et juste devant le Japon... et ceci depuis... 2021! Si on ajoute à ça que la Banque Mondiale est la première à reconnaître qu'il y a environ 40% de l'économie russe qui échappe à sa comptabilité, ça donne une tout autre perspective de la Russie actuelle que les bobards habituels.

(Une vidéo intéressante et quelque peu émouvante pour terminer, concernant la reconstruction de Marioupol, faite par un habitant de la ville : comparaison entre Marioupol avant 2022, pendant la bataille et actuellement, dans sa phase de reconstruction.)




samedi 11 mai 2024

Le paradoxe russe : boom économique au milieu des sanctions



    Dans cet article, je vais montrer que non seulement, les sanctions n’ont pas eu l’impact envisagé par les Washingtoniens (dont nos gouvernants font partie, je le rappelle à toute fin utile) mais qu’elles ont eu l’effet inverse, et qu’en réalité elles sont une des causes de l’essor spectaculaire de la Russie ces dernières années, spécialement après 2014.
    2014 est en effet l’année charnière, la date qui à mon avis doit être marquée en gros dans tous les manuels d’histoire à venir. C’est bien sûr la date à laquelle les Criméens dans leur immense majorité ont choisi, très démocratiquement, de rejoindre la Fédération de Russie (en réalité plus l’officialisation d’une réalité du terrain qu’autre chose) suite au coup d’état contre le gouvernement (modérément) pro-russe, élu lui démocratiquement, même si Yanoukovitch n’était pas forcément beaucoup plus brillant que les singes qui nous servent de leaders. Mais c’est surtout la date à laquelle le monde libre, démocratique et hautement vertueux de l’Ouest, a décidé dans son immense sagesse de déclencher l’enfer des sanctions économiques sur le peuple russe pour lui apprendre à respecter la démocratie ukrainienne, si exemplaire comme chacun sait. Pas 2021 ou 2022, non 2014. Jamais dans l’histoire du monde, de cette planète, un pays n’aura été autant sanctionné que la Russie depuis cette date, même pas la Corée du Nord !
    Il faut comprendre que ces sanctions ont pour but premier de punir les peuples pour voter mal, ou pour ne pas avoir commis quelque révolution sanglante, surtout pour eux, contre leur despote évidemment méchant et surtout rétif aux beaux enseignements dispensés par nos grandes démocraties. L’effet envisagé est donc de saper l’économie du pays ciblé, de baisser drastiquement le niveau de vie de ses habitants, jusqu’à ce qu’ils aient le courage de renverser leur odieux dictateur. Ce sont bien toujours les peuples qui sont visés dans ces plans si typiques de l’Occident des Droits de l’Homme, et parmi eux bien entendu les plus pauvres en particulier. Remarquons encore que les méfaits de l’OTAN et de son protégé vert de gris ciblent particulièrement la Crimée, qui a commis le double crime impardonnable de résister à ce criminel notoire de Porochenka et de sa bande de racketteurs en chemise brune puis de choisir de retourner à la Russie (qu’elle n’aurait jamais dû quitter si Kroutcheff n’en avait pas décidé autrement dans les années 50 pour d’obscures considérations politiques).
    Personnellement, je date le début de l’envol économique russe de 2014 ou peu après. Avant, de 1999 à 2014, la Russie avait connu dans l’ensemble une amélioration réelle de ses chiffres mais assez discrète pour passer sous le radar des occidentaux, en tout cas de ses grands médias. Le boost, ce catalyseur imprévisible des plus grandes réactions, a été fourni par la première vague de sanctions prise en 2014 par l’Empire. Dès 2015 et l’intervention de la Russie en Syrie, contre l’Empire et ses vassaux, on peut estimer que l’hégémonie mondiale des Washingtoniens est en train de vaciller, même si alors personne ou presque ne soupçonne le changement de paradigme en cours. On commence à se méfier de la Chine sans vraiment la prendre au sérieux (juste des fourmis asiatiques qui singent, très mal d’ailleurs, nos brillants cerveaux), on ne prend plus du tout au sérieux la Russie. Qui en Occident s’est aperçu que l’entreprise normale de démolition démocratique en cours de la Syrie par nos champions des Droits de l’Homme, si efficace en Irak, en Serbie ou en Lybie, avait été brutalement stoppée dans son élan vertueux puis rétrogradée par l’armée russe ? Pas grand monde, de toute évidence, mis à part les Syriens.
    Incontestablement, un second booster s’est allumé en 2021 lors de la vague suivante de sanctions, suivie de la troisième vague, de la quatrième vague, de la cinquième… propulsant toujours plus vite et plus fort la fusée russe. L’obstination des occidentaux est remarquable, l’exemple parfait de la stupidité (plutôt que de la folie) ainsi définie par Einstein : faire encore et toujours la même chose en espérant un résultat différent. Maintenant, il est évident que sanctionner la Russie ne suffit plus, il n’y a plus rien à sanctionner, il faut passer à la Chine. On peut prévoir d’admirables résultats là aussi, tant nous avons du mal à voir où sont nos atouts maîtres. Si l’effet de la première vague avait été progressif, peu sensible au tout début, il a en revanche été presque immédiat lors de la seconde, même pour les esprits les plus bouchés (et ce n’est pas ça qui manque par ici). Les Washingtoniens avaient l’excuse en 2014 de ne pas savoir que ce type de sanctions ne fonctionnaient pas sur la Russie (si les sanctions ont échoué précédemment a renverser les régimes haïs de Corée du Nord ou d’Iran, ils avaient en revanche eu un impact considérable sur leur économie, et donc sur les populations ciblées) et avaient même a posteriori l’effet inverse ; ils ne l’avaient plus en 2021, 2022, 2023, 2024.
    Pourquoi un tel effet, si paradoxal en apparence ?
    La première chose et la plus importante est l’énorme appel d’air que ces sanctions ont créé pour les entreprises russes. Quand vous sommez de fait, ou fortement invitez les grands groupes occidentaux à cesser tout commerce avec la Russie, vous créez les conditions idéales pour un afflux domestique massif sur les secteurs délaissés. Très difficile, sinon impossible, pour les entreprises russes de rivaliser avec des marques bien établies, à la clientèle prisonnière pour ainsi dire (pardon, il y a un terme plus élégant pour ça mais j’ai oublié), d’Airbus, de Boeing, Renault-Dacia, Volkswagen, Carrefour, Mac Donald, KFC, pour ne prendre que quelques secteurs parmi des milliers. Ne vous laissez pas distraire par tout le bla-bla à propos de « l’effort de guerre » qui générerait une hausse artificielle du PIB de la Russie. Il n’y a pas d’économie de guerre dans la Russie actuelle pas plus, et même moins, qu’il n’y avait d’économie de guerre aux USA lors de la guerre du Viêt-Nam. Une économie de guerre, c’est la France en 1914 ou l’Allemagne en 1939, l’URSS, le Japon et les USA en 1941 : ne confondez pas les situations, s’il vous plait. L’essentiel du boom de ces deux dernières années s’inscrit dans l’industrie (et pas seulement militaire), dans l’agriculture, dans la production domestique hors énergie. En réalité, comme le PIB (nominal et même par parité de pouvoir d’achat) est un instrument de mesure taillé tout spécialement pour le type d’économies occidentales, si on peut encore appeler ça des économies quand elles ne produisent presque plus rien, l’essor est encore bien plus considérable que ne l’avouent les chiffres officiels de la Banque Mondiale et du FMI, organismes à la solde de l’Empire (très littéralement) et donc peu susceptibles de dorer la pilule russe. En fait, on a réussi ce que les Russes ne parvenaient à réaliser tout seuls depuis des décennies, faire vraiment décoller leur économie dans son ensemble, et pas seulement les fusées Soyouz. Certains disent en Russie que le gouvernement Biden est le plus grand cadeau qui a été fait à la Russie par l’étranger et ce n’est pas seulement une manière de plaisanter. Les Russes, comme tout le monde, ont tendance à choisir la voie de moindre résistance, mais si vous les obligez à se retrousser les manches, à devenir créatifs, ils en sont parfaitement capables. Cet effet hautement bénéfique des sanctions ne pouvait bien sûr arriver que dans un pays en grande partie autarcique et possédant déjà toutes les composantes nécessaires à ce décollage : le niveau d’instruction général, la main d’œuvre qualifiée, le savoir-faire, les ressources, les infrastructures et la capacité d’investissement. Sur ce dernier point, il faut noter le surplus de la balance commerciale russe considérable depuis des années ; c’est cette masse financière qui lui a permis d’investir massivement et instantanément dans presque tous les secteurs délaissés par les entreprises occidentales (la réactivité russe lors des dernières sanctions a été si impressionnante qu’il est difficile de ne pas y voir un coup d’échec prémédité).
    Il y a d’autres domaines que l’économie où la Russie a particulièrement excellé depuis 2014. Je ne parlerai pas de l’aspect militaire qui devrait faire l’objet d’un article ou deux ici-même, dans la suite du cours des Âges comme disait Isidore Ducasse. En fait, j’en vois un où les progrès réalisés sont encore plus spectaculaires que ceux militaires ou économiques : je veux parler de la stratégie géopolitique dont une branche essentielle s’appelle la diplomatie. La diplomatie est devenue quelque chose d’entièrement obsolète en Occident. Depuis la chute de l’URSS et la conviction des Washingtoniens qu’ils étaient sans rivaux, ils ont décidé qu’ils avaient réalisé leur vieux rêve infantile : devenir les maîtres du monde, de la planète et de l’univers pour ce qu’on en sait. Dans cette vision, l’Europe, la vieille Europe, l’ancien Commonwealth et les deux du soleil levant ne peuvent prétendre qu’à un rôle au mieux d’ambassadeurs ou des seigneuries vassalisées. On ne parlera même pas d’Israël qui est de fait le cinquante et unième État des US, la base avancée de l’Empire chargée de faire régner l’ordre et les Droits de l’Homme au Moyen-Orient.
    L’idiotie patente — excusez l’expression mais je ne vois pas d’autres termes adéquats — consistant à traiter le reste du monde comme des arriérés, des dupes ou des écoliers à qui on distribue les coups sur les doigts révèle une arrogance et un dédain sans limite. C’est d’autant plus stupide quand vous savez à quel point l’Occident a besoin de ces mêmes pays pour continuer à faire fonctionner cahin-caha sa vieille civilisation rouillée. Il en a besoin pour la main d’œuvre bon marché, pour l’importations de biens divers tout aussi bon marché, pour exporter leurs déchets innommables, pour leurs ressources abondantes dont il manque tant (l’Europe en particulier mais aussi le Japon). Là encore, cette attitude déplacée, dirons-nous pour parler comme cette jeune fille bien élevée qui vient de se faire violer puis dévaliser par trois individus dans le métro (mais ils lui ont laissé quelques billets dans son portefeuille, c’est très gentil de leur part), a ouvert un énorme appel d’air. On sait que les Chinois n’ont pas été les derniers à s’y engouffrer. La Russie n’ayant pas la puissance d’investissement tous azimuts de son voisin asiatique a davantage choisi les endroits où pousser ses pièces, mais avec une réussite non moins évidente. Nous en avons eu dernièrement des preuves flagrantes, nous Français, avec les pays d’Afrique occidentale francophone qui passent les uns après les autres à « l’ennemi », mais cela ne se limite évidemment pas à ces seuls pays d’Afrique. Pourquoi passent-ils à l’ennemi ? Eh bien justement parce que nous ne savons plus faire de diplomatie. Celle-ci basiquement consiste à établir des rapports de confiance mutuelle entre égaux, impliquant nécessairement la franchise (contrairement à ce qu’on semble s’imaginer chez nous où le comble du raffinement de la diplomatie, comme de la politique d’ailleurs, est de promettre au « client » ce qu’il a envie d’entendre sans la moindre intention de joindre l'acte à la parole) où chaque partie fait des concessions, où chaque partie obtient un avantage de valeur à peu près égale à ce qu’il concède. Prenons un exemple un peu plus exotique pour un Français que le Niger ou le Mali : le Soudan. Actuellement, la Russie est en pourparlers avec le gouvernement soudanais du Nord pour obtenir l’autorisation d’établir une base militaire en mer rouge. L’intérêt pour la Russie est évident : les Houthis d’un côté, les Russes de l’autre : imaginez ces pauvres Washingtoniens pris entre ces deux feux ! En échange, les Russes proposent d’aider à débarrasser le pays des factions rebelles ou terroristes (probablement armés par la CIA, d’ailleurs, cet universel pourvoyeur de démocratie et de liberté comme on sait) et on connaît depuis la Tchétchénie, la Syrie ou le Mali leur efficacité dans ce domaine. Cela semble un bon deal. La force de la diplomatie russe ou chinoise est qu’elle est basée sur la franchise, le respect mutuel et l’assurance du partenaire que les promesses ne seront pas vaines. Les Chinois construisent réellement ce qu’ils ont promis, parfois même gratuitement, comme en Éthiopie, les Russes combattent efficacement les groupes divers et variés chargés d’apporter le chaos dans tous les pays que l’Empire n’aime pas. Les Américains, culottés comme toujours, et les Européens, de plus en plus niais, viennent pleurnicher après sur les babouches des Africains qu’ils perdent toutes leurs anciennes colonies au profit de ces affreux Chinois ou Russes. J’ai encore entendu récemment un « diplomate » allemand venir se plaindre devant le président de la Namibie (une ancienne colonie allemande) que son gouvernement fricotait beaucoup trop avec les Chinois et pas assez avec eux. Oh très poliment dit ! Ces Allemands sont devenus très polis ; ils disent même merci quand leurs amis washingtoniens font exploser leur tuyau principal d’énergie bon marché : vraiment très polis. Mais enfin personne n’est dupe et surtout pas le Namibien en question. Pourquoi pas avec les Chinois, a-t-il répondu ? Ils sont corrects, nous en donnent pour notre argent contrairement à vous, et ne nous distribuent pas des leçons de morale en prime. Voilà en gros la teneur des dialogues actuels entre les « diplomates » occidentaux et les gouvernements du « reste du monde ». Et qui peut s’étonner sérieusement que nos entreprises perdent sans cesse des parts de marché dans le « reste du monde » au profit des Chinois ou des Russes ? Qui construit en ce moment-même des centrales nucléaires en Turquie, en Égypte, au Bengladesh, en Hongrie, en Slovaquie, en Inde et en Chine ? Non, ce ne sont pas les Français. Je vous donne un petit indice, ça commence par un R comme dans Russie et Rosatom. Pourquoi y-a-t-il une telle attirance pour les BRICS dans ce vaste « reste du monde » ? Les bonnes relations diplomatiques appellent les bonnes relations commerciales, cela va de soi. Ce n’est évidemment pas que les Africains ou les asiatiques ou les "autres" Américains aiment particulièrement les Russes ou les Chinois, c’est juste que leur intérêt est pris en compte par ces derniers et que discuter avec ces gens-là est au final bénéfique pour leurs pays. Qu’est-ce qu’il y a de dur à comprendre là-dedans ?

    Pour finir, en guise d’illustration du boom économique de la Russie actuelle, je mets ci-dessous cette vidéo de Rhod MacKenzie, un Britannique comme tout le monde peut le deviner aisément, ne serait-ce qu’à son horrible accent d’Oxford (oui, je sais, on ne doit pas dire ce genre de choses), mais vivant et travaillant en Russie depuis bien des années. Eh bien, à en juger son état physique, il ne doit plus être très actif. Je sais que le bonhomme peut faire peur à voir, rivé éternellement à son lit décoré aux couleurs du Royaume-Uni, sans parler de ses tics de diction désagréables, mais je vous invite à l’écouter très attentivement (si vous n’êtes pas anglophone, vous pouvez toujours opter pour la traduction automatique en français, ou en russe, si vous êtes sur Yandex !) : sa compétence et son expérience en matière d’industrie, spécialement minière, me semblent indubitables. Ce qu’il dit est vraiment très intéressant, si intéressant que vous pourriez avoir envie de consulter sa chaîne Youtube qu’il alimente presque quotidiennement (j’imagine que c’est son passe-temps d’infirme alité). Le sujet pourra surprendre quelques-uns car bien que la Russie soit réputée comme une grande productrice de ressources naturelles, tel le gaz ou le pétrole, on ignore généralement qu’elle est très bien placée pour l’extraction de cette relique barbare venue du passé, l’or. Actuellement, c’est même le second producteur mondial et selon cet expert, au vu des ressources disponibles et de la montée en puissance de sa production, elle devrait prendre la pole position dès 2025. Ce qui est encore plus intéressant est que le boom de cette industrie en Russie est en fait récent, dû à une volonté gouvernementale très claire. Eh bien qui ne voudrait pas posséder de l’or physique en ce moment et encore plus dans les années à venir (et je ne parle pas ici de décennies) ? Là encore, je crois qu’on peut sans timidité mettre cet actif si judicieux en cette époque troublée parmi les pièces maîtresses de la Russie sur l’échiquier international et parmi les grandes réussites stratégiques du gouvernement russe, en particulier de son leader si sympathique, VVP.