samedi 11 juin 2022

USA, Europe, France : bientôt le meilleur des mondes (discours de notre bien-aimé Président du club des Homocidaires)

Certains parmi vous, chers Frères, pourraient croire que nous faisons de l’ironie avec ce titre aux perspectives grandioses. C’est bien mal nous connaître. Nous sommes au contraire d’un sérieux confinant à la sévérité, que dis-je, à la gravité. Nous n’aimons pas les plaisantins. Nous répugnons franchement à la légèreté qui prétend — faussement — à l’esprit. À l’altitude où nous évoluons, l’ironie, encore moins la plaisanterie, n’a sa place. L’humour est la marque de l’imperfection, de la faiblesse. Et bien que nous soyons déjà fort, nous cherchons encore la perfection. Si nous avions voulu être ironique, ce qui nous arrive dans nos (rares) accès de faiblesse, nous aurions sous-titré ce discours "entre Charybde et Scylla", ou mieux, "entre la peste et le choléra". "Entre Charybde et Scylla" est bon, certes, je ne vous le fais pas dire, mais trop poétique pour notre époque ; "entre le marteau et l’enclume" est déjà mieux sans être excellent, "entre peste et choléra" est juste parfait de par son caractère hygiénique et ses références évidentes à l’actualité, tout à fait moderne donc, et nous l’aurions privilégié. Mais de toute façon, cette digression n’a aucun sens puisqu’il n’est absolument pas dans notre intention d’annoncer à nos très chers confrères Homocidaires un avenir sombre mais au contraire le plus ensoleillé qui soit. Le meilleur des mondes dont nous parlons est à prendre non pas au sens de Huxley, satiriste laborieux et piètre romancier, ou de son traducteur, mais au sens propre, un monde qui suit nos préceptes Homocidaires, il va sans dire (pour les étourdis qui n’auraient pas encore étudié notre manifeste où sont promptement synthétisés les préceptes hygiéniques et moraux du nouvel Homocidaire en vingt-huit volumes, nous nous permettons de les renvoyer ici).

Non, ce que nous annonçons là est véritablement le grand changement que nous attendons tous, cet avenir radieux pour les élus, toujours rares, les petites fleurs et nos amis les loups, précisément dans la partie du monde indiquée plus haut.

Oui, vous avez bien lu, nous nous lançons dorénavant dans le grand style, dans la prédiction, l’oracle, et, n’ayons pas peur des mots, la prophétie zarathoustréenne.

Nous ne vous dirons pas quel événement se produira ici ou là, le 17 mars 2023 à 12 h 57, ou le 24 juillet 2024 à 5 h 09 car nous sommes bien au-dessus de tels minutiae, mais nous vous annoncerons les événement principaux à venir dans le bon ordre et dans leur exactitude.

Nous ne sommes certainement pas Cassandre car contrairement à elle, nous ne prédisons que des bonnes choses pour notre pays, et les seules nouvelles que nous annonçons sont empreintes de la joie la plus élevée, celle de l’élu passé au crible de la grande tribulation, contemplant le paradis depuis sa cabane dans les cimes verdoyantes et inviolées, ni plus ni moins.

Et nous sommes ravis de prédire que les USA, cette immense nation, et l’Europe, dont la grandeur temporelle compense pour le moins sa petitesse spatiale, sont maintenant vertueusement engagées dans la voie du meilleur des mondes, l’Homocide intégral et sans retour. Il n’est en effet plus de retour possible, tous les ponts sont brûlés derrière nous, la victoire devant nous est certaine.

Commençons toutefois par notre raisonnement à partir des faits, puis nous ferons nos prédictions.

Notre raisonnement est le suivant. Les USA, l’Europe, au bord d’une crise économique majeure, sont devant une alternative dont les deux termes nous semblent également exaltant, mais il en est pourtant un supérieur à l’autre, comme nous allons voir tout de suite. La première solution à cette alternative est de remonter fortement les taux d’intérêt pour diminuer l’inflation et favoriser ainsi ceux qui n’ont rien ou pas grand-chose, au dépend de ceux qui ont beaucoup d’actifs (maisons, hôtels, bateaux, actions, obligations, etc.) puisque la remontée des taux fait diminuer la valeur réelle de tous ces biens. La seconde possibilité est de ne pas les remonter, comme dirait Monsieur de La Palisse, de remettre la machine à imprimer des billets en route et même de mettre la barre sur full speed (elle ne s’est jamais vraiment arrêtée mais des rumeurs incessantes nous signalent que certains agents séditieux, probablement russes, voudraient la freiner, voire l’arrêter, comme dans "When The Machine Stops" de Forster, un bon livre s’il avait été écrit selon le point de vue qui convient, qui est le nôtre) et de favoriser ainsi la classe la plus riche de la société, celle qui est généralement la plus enthousiaste pour se rendre aux urnes et qui, de plus et surtout, fait de généreuses donations à nos politiciens qui ont toutes ces excellentes idées. Pourquoi la seconde solution est bien meilleure, outre le fait qu’on n’a jamais vu des politiciens dans nos belles démocraties qui ne soient pas soucieux de leurs chers électeurs, est à cause de ceci : cette option fera flamber les prix, tous les prix, en particulier ceux des matières sataniques, tel le pétrole ou le gaz, la viande et les féculents. Et nous aurons de l’inflation, de la vraie, de l’hyperinflation comme on n’en a pas vu de mémoire d’homme sauf si vous avez vécu vraiment très très longtemps. Et cela est très bien car il y aura des protestations, des émeutes, puis des guerres civiles (les gens aimant rarement se sacrifier de leur plein gré même pour la plus noble des causes) et il y aura beaucoup de morts et donc de grands et beaux cimetières où les petits oiseaux viendront gazouiller joyeusement le jour et même la nuit. Et il y aura beaucoup plus de place pour les petites fleurs et nos amis les loups. Et nous, les Homocidaires agréés, rares élus de ce paradis, pourront nous réjouir pour l’éternité de ce merveilleux spectacle de l’harmonie retrouvée depuis nos cabanes dans les arbres, ou peut-être, depuis nos abris souterrains plus ou moins blindés. Ceci est ma première prédiction.

Et voici la seconde vision. Par la faute de nombreux mauvais esprits restant dans ce pays, les USA, je vois que malheureusement, là-bas, le meilleur des mondes sera quelque peu différé. Je pronostique en effet de longues et pénibles discussions, et même quelques bousculades assez serrées entre les partisans de la solution numéro 1 et la numéro 2, avant que cette dernière, bien entendu, ne finisse par l’emporter. Par bonheur, nous Européens, sommes beaucoup plus sages, beaucoup plus intelligents, et nous avons compris où est notre plus grand bien. Il est déjà évident que nous montrons un zèle plus vif que les USAméricains dans l’application rigoureuse et rapide des préceptes de l’Homocide, comme le démontrent Sainte Greta et Saint Cretain, il est donc tout naturel que nous soyons les premiers à profiter de ce nouveau paradis sur Terre (et sous terre parfois). En tout, les Européens ont été précurseurs et le resteront donc… jusqu’à la fin : ce n’est pas une mince satisfaction.

Hélas, j’en viens maintenant à la partie la moins agréable de ces prophéties. Car si l’Europe, et avec un temps de retard, les USA (qui ne s’appelleront évidemment plus ainsi puisque, je vous l’annonce en passant, la Californie retournera au Mexique ainsi que les deux autres états du sud-ouest dont j’ai oublié le nom — déjà oublié ! c’est un signe — que l’Illinois, le Michigan et tous les états du Nord-Est s’allieront avec ce qui restera du Canada pour former le Grand Québec Libre (enfin !), et que tous les autres seront à peu près aussi désertiques que l’Alaska, ce qui nous évite la peine de leur chercher un nouveau nom), je dis hélas car il n’en va pas du tout de même pour les barbares de la steppe et de la taïga, je parle des Russes, Tatars, Mongols et autres mongoloïdes. Ces derniers seront précipités dans la plus grande calamité qui soit, la surpopulation, les villes enfumées, les usines mortifères, les marées noires, les autos pétaradantes, les bateaux, les avions, les fusées, tous marchant au pétrole démoniaque que nous leur avons laissé sans regret, et il y aura des ponts et des barrages construits sur chaque rivière, et des bruits de tronçonneuses et de tracteurs monstrueux dans chaque forêt et les gentils animaux ne pourront traverser une route où un sentier forestier sans se faire écraser dix fois.

Et pendant cela, nous, amis des calmes cyprès, nous respirerons l’air pur à pleins poumons en mâchant des pissenlits, en écoutant les petits oiseaux et en hurlant, parfois, comme nos amis les loups…


Les sources informées de cet article satirique, très sérieuses et recommandables, ainsi que de plusieurs articles précédents sont, pour l'essentiel, Jacob Dreizin from the Dreizin report pour l'économie, Alastair Crooke pour la géopolitique (hélas devenu difficile à trouver car son canal habituel, Strategic Culture, a été "cancelled" par le Haut Commissariat Européeen à la propagande) et Andrei Martyanov pour l'aspect martial.
Autre article du club des Homocidaires: ici.

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