dimanche 15 décembre 2024
Ma peinture du dimanche : l’Alpha et l’Oméga
vendredi 29 novembre 2024
Old Rottenhat : le second et ultime chef d’œuvre de Robert Wyatt
En 1982 est paru l’album compilation Nothing can stop us aux titres disparates allant du génial au péniblement audible, qui contenait ce titre passé complètement inaperçu Born again cretin. Ce morceau au titre peu attirant, reconnaissons-le, est pourtant la formule magique qui englobe à peu près la totalité de ce chef d’œuvre de la musique minimaliste contemporaine qu’est sans aucun doute Old Rottenhat.
A sa sortie en 1985, Old Rottenhat n’a pas reçu plus d’attention que le morceau précurseur de 1982 (en fait au plus tard 1981 pour l’enregistrement) : bref il est tombé dans un puits très profond d’où il n’est d’ailleurs jamais vraiment ressorti. Deux aspects peuvent et doivent expliquer au moins en partie cela. Les deux aspects sont d’ailleurs fortement liés. Le premier est la dédicace de l’album mal pensée pour la popularité à Michael Bettany (sic), agent du MI5 arrêté et condamné, non sans quelques raisons, pour espionnage pour le compte de l’URSS. Le second est l’engagement politique déclaré de Wyatt dans presque la totalité des titres de l’album, engagement très à gauche (si mes renseignements sont exacts, Wyatt était encore encarté au Parti Communiste anglais en 1985) ce qui dans la terre de Thatcher* a peu de chance d’être gage de succès. En fait, bien que je n’ai trouvé aucune explication au titre de l’album, je suis à peu près certain qu’Old Rottenhat (‘vieux chapeau pourri’ pour le nuls en langues étrangères) désigne non seulement l’Angleterre mais le genre de civilisation dont l’Angleterre est un des plus beaux représentants (ah, ah !).
Enfin, pour expliquer ce flop total, on doit remarquer que la musique de Wyatt n’a jamais été de toute façon en vogue, quoique régulièrement saluée par un petit, tout petit public, du genre Art & Essay (d’ailleurs l’album est classé dans la catégorie ‘Art Rock’, bien qu’il n’ait rien d’expérimental avec toute la cacophonie qu’on associe à ce libellé).
En fait le pic du militantisme dur, branche historique, de Wyatt était déjà passé si on compare l’album au précédent qui contenait quand même quelques titres colorés très ‘rouge’ comme Stalin wasn’t stallin, Red Flag ou Stalingrad, tous trois faisant référence au combat de l’armée soviétique contre les nazis, épisode devenu sans importance car pour ainsi dire disparu, comme bien d’autres, dans la Matrice. Néanmoins, l’album pointe à peu près toutes les hautes vertus de notre civilisation occidentale, comme la gratitude envers ceux qui font avancer le navire au fond de la cale (Alliance, le morceau que je vous conseille d 'écouter en lisant cet article -- voir plus haut), l’amour de son prochain et des Amérindiens en particulier (The United States of Amnesia), un exemple parmi beaucoup d'autres de la bonté de l’Empire envers les défavorisés en matière de liberté et démocratie (East Timor), l’individualisme enfin libre et sans entrave (The age of self), les beautés d’un bord de mer bétonné pour le plus grand bien-être de touristes sympathiques (Vandalousia, Wyatt est hispanophone si vous ne comprenez pas le titre), une critique de la Grande-Bretagne à laquelle je n’ai rien compris (ça m’arrive aussi : The British Road), une éloge de nos grands médias si épanouissants (Mass Medium), une autre éloge de notre goût pour les langues nouvelles si pleines de sens (Gharbzadegi). On pourrait même inclure PLA, le titre final très bref et très émouvant, dans ces morceaux politiques. Bien qu’il soit une ode à sa femme (la « Poor Little Alfie » en question), qui a eu en effet bien du mérite à supporter (dans tous les sens) Wyatt toutes ces années, et pas seulement à cause de la perte de ses membres inférieurs dont celui qu’on ne peut nommer, PLA veut généralement dire en anglais Armée de Libération du Peuple, qui est le petit nom de l’armée de Mao et encore aujourd’hui de l’armée chinoise, ce qu’un ‘rouge’ comme Wyatt ne pouvait ignorer. Le seul morceau incontestablement apolitique est le bien nommé Speechless.
Le contraste extrême entre ces textes militants, on ne peut plus terre à terre donc, et cette musique des sphères, stratosphérique, une élévation vers les cieux les plus purs qui peut rappeler par son esprit et son minimalisme L’ascension de Messiaen a dû certainement déconcerter beaucoup d’auditeurs. Comme je l’ai résumé en quelques mots dans mon article précédent sur l’artiste (qui date tout de même de dix ans) Old Rottenhat est la quintessence du Wyatt lumineusement éthéré quand Rock Bottom est la quintessence de sa descente aux abysses. C’est son yin et son yang. Son alpha et son omega. Son zénith et son nadir. Après Old Rottenhat, Wyatt deviendra plus bénin tout en restant toujours intéressant et parfois encore très bon. C’est aussi le dernier album où il dispose intégralement de son instrument de musique le plus précieux : sa voix, ou plutôt ses voix.
La voix est en effet l’instrument principal de l’album. Pour s’accompagner, Wyatt utilise un genre de synthé (ou peut-être des synthés ?), une basse, des percussions rudimentaires (par force, il manque de pieds) et du piano sur un titre. C’est très peu. Minimaliste comme je l’ai dit. Ce minimalisme cependant est probablement dû en partie à la nécessité, au fait qu’il était alors dans le creux de sa ‘popularité’ qui de toute façon n’avait jamais été bien grande. En faisant tout soi-même, on limite beaucoup les frais. Si on ajoute que la pochette est peinte par sa femme, Alfreda Benge, l’Alfie du dernier titre, voilà encore une économie de réalisée. Néanmoins, ce n’est pas la seule raison. Wyatt est un véritable homme-orchestre et il aurait très bien pu ajouter aux instrument crédités de la guitare, de l’orgue, du trombone, de la trompette, du cornet à piston. Et il faut comprendre qu’il ne se contente pas de savoir se servir de ces instruments, il est toujours étonnamment créatif, personnel et remarquable dans sa façon de les utiliser. Il y a donc bien un choix de sa part pour cet album de réduire l’orchestration. Ce minimalisme, cette économie de moyens donne à la musique une homogénéité saisissante, presque hypnotisante. Du coup, chaque petite saillie, la moindre note de piano, le moindre coup de cymbale, le moindre sifflet prend un relief particulier. La formule magique de cette musique, qui a été mise au point avec Born Again Cretin, qui semble annoncer une résurrection ou en tout cas son désir, et qui est encore plus concentrée dans le morceau instrumental Speechless, n’est peut-être pas entièrement de Wyatt. Je suis en effet frappé par sa familiarité avec la musique de la très belle ballade de Captain Beefheart intitulée Harry Irene de l’album Shiny Beast (en voilà un que je ne pouvais manquer). Je vous ai mis à la fin de l’article un extrait du morceau de Beefheart pour que vous puissiez comparer. L’album du Captain est à peu près contemporain des titres de Nothing Can Stop Us, il est donc difficile de dire qui a inspiré qui. En fait, il est très possible que ni l’un ni l’autre n’ait eu connaissance de la trouvaille de l’autre. Les grandes et belles idées, musicales ou non, se mettent soudain à flotter dans l’air de ci de là, et on a déjà connu le cas où deux génies avaient la même idée en même temps ou presque, quoique dans des régions du monde très éloignées. Car les génies n’inventent pas les idées ni même ne les découvrent, ils voient et entendent simplement ce que tous les autres ne voient ni n'entendent encore.
Malgré toute la beauté, la grâce séraphique d’Old Rottenhat, je reste un peu plus proche du côté sombre, celui de Rock Bottom. Et j’en sais la raison (outre le côté sombre). Avec peu de musiciens, Rock Bottom donne une impression de foisonnement, de luxuriance, de brillance qui me manque un peu dans Old Rottenhat. En musique, je suis un adepte presque exclusif des ensembles de chambres, mais là, on est tout de même dans un tout petit cabinet. J’aime par-dessus tout les ensembles dont le nombre de musiciens n’excède pas les doigts des deux mains mais dépasse toutefois le chiffre un. Alors, on peut entendre chaque instrument dans ses caractéristiques, son véritable éclat. Cela est vrai pour tout genre de musique : rock (si ce terme veut encore dire quelque chose), folk, jazz, classique, surtout classique ou les grosses pâtes orchestrales sont, pour mon oreille, une des plus grandes tares de la musique occidentale. Je crois d’ailleurs que c’est une des raisons du succès de la musique pop, jazz, rock qu’il n’existe très généralement pas plus d’une dizaine de musiciens et donc d’instruments jouant simultanément, au moins sur scène.
Clairement, même si c’est une force de l’album, même si c’est d’une efficacité extraordinaire, son minimalisme est un peu austère pour moi. Oui, c’est très curieux mais une des plus grandes forces d’Old Rottenhat vient de ce qui aurait dû être sa faiblesse, un manque, un vide, un vide certainement involontaire (car Wyatt a prouvé toute sa carrière durant qu’il n’adore rien tant que de jouer en groupe) : l’absence d’autres musiciens. Une autre de ses plus grandes forces est une caractéristique finalement — on peut dire finalement maintenant que Wyatt a pris sa retraite — très inhabituelle dans sa discographie : le fait qu’il ait intégralement écrit l’album, paroles et musiques, sans aucune contribution extérieure. Il n’a fait cela que deux fois dans sa vie et cela a donné Rock Bottom et Old Rottenhat.
En conclusion, je ne peux qu’encourager tout amateur de musique curieux et raisonnablement intrépide à essayer l’écoute du titre mis en illustration sonore ci-dessus si ce n’est pas fait. La musique d’Old Rottenhat est très simple, le genre de simplicité à laquelle seuls les plus grands artistes peuvent atteindre. Et s’il aime, cet auditeur curieux, peut-être voudra-t-il s’embarquer pour des contrées certes plus sauvages et désolées mais non moins belles, celles de Rock Bottom ou, pourquoi pas, de l’extraordinaire joyau (très) noir The Hapless Child de Michael Mantler, où Wyatt fait toutes les voix (on dirait ici qu’il en a sept) à côté de quatre grands musiciens.
*Une curiosité à propos de Thatcher : très paradoxalement pour ce gauchiste assumé, Wyatt lui a consacré un de ses plus beaux titres et curieusement un de ses plus émouvants, quand il est vrai elle n’était plus que l’ombre d’elle-même, s’étant perdue comme beaucoup dans le monde ténébreux d’Alzheimer : cela s’appelle ‘Cuckoo Madame’ de l’album Cuckooland. Bon, soyons honnête, c’est Alfreda Benge qui a écrit le texte, mais enfin l’intention y est.
mercredi 6 novembre 2024
Un agent russe insoupçonnable prend sa retraite
Aujourd'hui, 6 novembre 2024, un grand événement a eu lieu, passé inaperçu, et c'est bien normal, de la totalité de nos grands médias: Yosif, nom de code "Sleepy Joe", plus connu en Occident sous le nom de Joseph Robinette Biden, vient de recevoir son avis de retraite (qui commencera officiellement en janvier prochain). On le voit ici dans son nouvel appartement avec vue, donnant sur le parc aux couleurs automnales, qui sera sa dernière demeure. On sent parfaitement que l'homme a déjà pris ses marques, si heureux de se retrouver chez les siens dans la grande banlieue moscovite après toutes ces décennies passées loin de la mère patrie. Que de nostalgie! Pour fêter l'événement, il a sorti le bocal de cornichons malossol et la bouteille de vodka russe populaire, pas comme ces imitations juste buvables qu'on nous vend en Occident au prix de l'or, et on remarque qu'il n'a pas oublié la pince à cornichons, qu'il sait manier, il est vrai, avec une dextérité hors du commun.
Nos canaux d'information privés nous permettent en effet d'affirmer que celui qui a présidé les USA pendant ces quatre dernières années et vice-présidé de 2012 à 2016 n'était autre que le plus grand espion de l'ère moderne. On n'a jamais vu de couverture plus parfaite. Durant toutes ces années passées en terre hostile, il n'a eu de cesse de peaufiner son image de parfait russophobe. Cette tactique a certainement grandement contribué à son irrésistible ascension vers le pouvoir . C'est alors qu'il est arrivé au sommet ou presque -- en 2012, en tant que Vice-Président -- qu'il a pu donner sa pleine mesure et que d'agent dormant ("sleepy joe") il est devenu l'agent opérationel "Action Joe". L'opération "Ukraine en feu"* lui ayant été confiée par le grand Obama, qui avait d'autres chats à fouetter, c'est-à-dire d'autres Etats à démocratiser et libérer, comme la Lybie ou la Syrie, il a pu organisé avec le concours de quelques sous-fifres comme John Mac Cain ou Victoria Nuland le coup d'état de 2014 qui a démarré la chaîne d'événements fatidique devant signer au bout du compte la démission de l'Empire. La stratégie de Yosif aura en effet été toujours de feindre de s'attaquer à la Russie quand en réalité il lui offrait des opportunités économiques, politiques et finalement militaires. Tout en parlant de détruire la Russie, en annonçant sans cesse échec au roi Poutine, il facilitait l'isolement et l'aliénation de l'Empire par l'élimination de ses pièces les plus dispensables, du fou ukrainien évidemment, de la tour (industrielle) germanique, de la reine britannique (qui en fait est devenue un roi), sans parler des autres menus pions européens, trop insignifiants et nombreux pour être cités. Dans le même temps, loin de porter les coups fatals à la Russie qu'il prétendait lui assener, on s'aperçoit que celle-ci n'a cessé de se renforcer militairement, industriellement, économiquement, socialement, diplomatiquement pendant ses mandats: cela ne peut être une coïncidence. Alors même que cette année, un peu plus tôt, il nous annonçait encore (pour la dixième, douzième, dix-huitième fois) la fin imminente de la guerre en Ukraine grâce à la défaite totale de la Russie, de par son effondrement économique et social tout au moins, la Banque Mondiale d'abord puis le FMI, organismes peu susceptibles de russophilie, nous annonçaient que la Russie venait de passer devant l'Allemagne et le Japon en terme de PIB par parité de pouvoir d'achat. Eh bien, le fait que notre ami Yosif ait beaucoup œuvré pour finir de transformer ces (ex) puissances industrielles en vassaux de l'Empire taillables et corvéables n'y est probablement pas pour rien.
Avoir maintenu sa couverture tout ce temps est bien sûr en soi seul un exploit digne des plus grandes légendes**. Avoir si rapidement sapé la position et le crédit (dans tous les sens) de l'Empire tout en renforçant ceux de la mère patrie sur l'échiquier mondial en est un autre. Enfin, nous tenons à souligner tout particulièrement son dernier coup de génie, qui aura été de feindre une sénilité précoce proche de la démence (on voit bien sur la photo que l'homme s'est débarrassé de sa prétendue infirmité aussitôt sa mission terminée et la terre natale retrouvée) afin de mettre sur le compte de sa faiblesse pardonnable une série de décisions de plus en plus étranges, contreproductives, confinant au pur et simple sabotage domestique (et c'était bien leur but). Le seul regret de Yosif, nous a-t-il confié lors de notre entrevue entre deux petits verres de son excellente vodka à moins de 350 roubles soit 4 dollars la bouteille trouvée au plus proche supermarché Achann de Prospekt Proletarsky**, aura été de ne pas avoir réussi à éliminer Trump, malgré toutes ses tentatives, dont une au moins aura bien failli réussir (voir cet article).
*Voir le film du même nom ("Ukraine on fire") d'Oliver Stone, pas encore censuré sur Youtube apparemment.
** En matière de légendes, je ne saurais trop conseiller le plus grand film d'espionnage qu'on ait jamais fait : "17 moments du printemps".
*** En français : le supermarché Auchan de l'avenue du Prolétaire (existe réellement, toujours maintenant, dans la banlieue de Moscou).
vendredi 1 novembre 2024
"Russie : un mystère drapé dans une énigme"*
Que diable fabriquent-ils?
Si vous vous intéressez aux
événements géopolitiques majeurs qui ont cours en ce moment-même (quelle
chance !), ce grand basculement des plaques tectoniques, vous vous êtes forcément demandé, une fois au moins, par quel
miracle la Russie pouvait tenir tête et en réalité laminer lentement mais
sûrement toutes les forces de l’OTAN réunies (les mercenaires ukrainiens ne
servant que de proxy sacrifiable et relativement bon marché dans ce conflit
Russie/Otasunie). On vous a dit et répété que le budget militaire de la Russie
était dix fois moindre que celui des USA. Peut-être même avez-vous découvert
que ce budget était environ 30 fois inférieur à celui de tout l’OTAN réuni
(sans compter donc les acolytes du Pacifique). Comment est-ce donc
possible ?
Dans cet article aux visions puissantes mais parfois trop simplistes, j’avais tenté une première explication pour éclaircir ce
mystère. En bref, je supposais que la différence de pouvoir d’achat en Russie
et aux USA pour une même quantité de dollars donnée compensait grosso modo l’écart
de budget. En clair donc, je supposais qu’avec la même quantité de dollars, un Russe
pouvait acheter dix avions, dix tanks, dix missiles, etc. quand l’Etasunien ne
pouvait en avoir qu’un seul. Mais ayant fait mes devoirs et possédant maintenant
une connaissance plus informée du sujet, je dois admettre que cette explication
— malgré ses mérites incontestables — ne suffit pas. L’écart de prix entre un
avion de chasse russe et un avion de chasse US, de même capacité et de même génération
n’est pas d’un à dix mais en moyenne d’un à deux. Cet écart semble constant
depuis des décennies et si on prend les chasseurs de dernière génération en
activité à titre d’exemples, le Sukhoï 57 coûte respectivement 1,7 fois et
2,5 fois moins que ses deux vis-à-vis possibles, le F35 et le F22 (et 2 fois
moins que le Rafale, dernière génération). Pour les munitions, l’écart est un
peu plus grand mais on est toujours très loin d’un ratio d’un à dix. De plus,
comme le conflit concerne l’OTAN tout entier, l’écart théorique à combler n’est
pas d’un à dix mais donc, comme précisé plus haut, d’un à trente.
Comment résoudre l’équation, quelle
inconnue doit-on ajouter pour au minimum équilibrer les deux côtés de la
balance a été et est toujours un casse-tête chinois pour les plus grands
experts militaires et économiques de l’Otasunie. Plus bizarrement encore, bien
que je lise et écoute beaucoup de spécialistes russes, ou au minimum
russophones, je ne peux pas dire que ces derniers m’aient semblé beaucoup plus versés
dans les arcanes de ce mystère. Avec les Russes, vous devez de toute façon vous
attendre à une réponse du style : « eh bien c’est comme ça parce que
c’est comme ça : un point c’est tout ».
Pourtant, pas plus que moi, ils ne
pensent que leurs systèmes d’armements serait dix fois (ou trente fois !)
supérieurs à ceux de l’OTAN.
Une partie du mystère peut être cherchée
dans le fait que le rythme de production et donc la quantité de ces divers
équipements militaires sont plus élevés en Russie que dans les pays de
l’OTAN. Comme le disait Staline, la quantité a une qualité en soi qu'on aurait bien tort de dédaigner. Généralement
les experts s’accordent pour dire que le rythme de production des différents
armements est environ deux fois plus élevé en Russie que dans tous les pays de
l’OTAN réunis. Toutefois, vous noterez qu’en plus d’être partielle, c’est une
fausse explication. En effet, elle ne fait que déplacer l’énigme. Comment alors
est-il possible qu’un pays qui a un PIB nominal cinquante ou cent fois moindre
que celui du bloc adverse, les USA avec les Eurozonés plus les laquais du
soleil levant ou des antipodes ait un rythme de production deux fois supérieur
à celui de toutes ces fines fleurs de la civilisation, qui contient pourtant
quelques puissances industrielles reconnues ? Bien sûr le PIB, comme
indicateur de la puissance industrielle ou même économique d’un pays est pour
l’essentiel une fable, un conte pour enfant, comme je l’ai indiqué dans un précédent article. Mais il reste tout de même un océan à combler.
Une autre petite partie de
l’explication peut et même doit impliquer l’économie de type assez particulier
qu’on trouve en Russie. Bien que celle-ci soit très largement privatisée, elle
reste pilotée dans ses grandes directions par le Kremlin. Comme toujours,
celui-ci agite aussi bien la carotte que le bâton, même si maintenant il se
sert beaucoup plus de la première. Dans la Russie actuelle, les incitations
sont massives pour que les industriels aillent dans la direction souhaitée ou
plutôt les directions car il y a tout un éventail de domaines où l’État Fédéral
investit lourdement et ces domaines n’ont souvent qu’un lointain rapport avec
l’armée, et parfois aucun. Ce type de politique économique mixte, en partie dirigée,
voire planifiée, est en sainte horreur chez nos zélotes du marché libre et
concurrentiel, mais le fait est qu’elle marche pas si mal, en tout cas en Russie. Notons
d’ailleurs que ce n’est pas fondamentalement différent des subventions très
généreuses accordées par nos pays de l’Otasunie à certains secteurs privilégiés
(mais avec une efficacité considérablement moindre comme chacun a pu se rendre
compte à moins d’être greffé dans la Matrice depuis la couveuse). Enfin il y a
en Russie ces entreprises qu’on peut qualifier d’étatiques — même si c’est un peu
plus subtil que ça — comme ROSATOM, ROSTEC, ROSCOSMOS, GAZPROM. Leur
particularité est qu’elles ne sont pas toujours tenues d’augmenter leur
bénéfice ou parfois même d’en faire du tout mais qu’elles sont tenues
prioritairement de réaliser les objectifs fixés par l’État, quitte à déplaire à
leurs "actionnaires". Et quand le Kremlin leur dit d’augmenter la production
dans tel ou tel secteur, eh bien elles l’augmentent. Dans une situation de
guerre, c’est évidemment un gros avantage. Ajoutons que cette décision
d’augmenter la production industrielle dans le secteur de l’armement et de tout
ce qui s’y rapporte a été prise des années avant le début de l’Opération
Militaire Spéciale.
En somme, on a en Russie une
économie qui dans une mesure importante est au service de l’État et du pays
quand nous avons par ici une économie entièrement au service de ses
actionnaires, et surtout de ces quelques oligarques sans pays ni frontières qu’on retrouve dans tous les Conseils d’Administration des grandes
entreprises et qui sont les seuls vrais bénéficiaires du système (avec bien sûr
les politiques qu’ils arrosent dûment en retour de leurs bons services). À
chaque fois que l’UE ou les USA ont tenté ces dernières années d’augmenter la
production d’armements, cela s’est soldé par un échec à court et moyen termes,
soit parce que les usines disponibles ne sont pas assez nombreuses ou manquent
de la capacité d’accroissement (de par leur politique de flux tendu, elle-même
découlant de leur politique de rendement financier maximal, elles sont presque
toujours au taquet), soit parce que les prix se sont mis aussitôt à flamber. On
en a eu un exemple spectaculaire cette année avec l’UE : après son appel
d’offres pour acheter des obus de 155 mm (les principales munitions utilisées
par les canons modernes sur le champ de bataille du côté otasunien) dont
l’armée ukrainienne était (et est toujours) en manque, le prix de celles-ci a
été quasi multiplié par dix sur le champ. Le résultat net a été que l’UE a pu
acheter moins de munitions pour un prix plus élevé. Bien sûr, on
peut toujours rêver et se dire que sur le long terme, la production d’armements
de l’Occident finira par rejoindre celle de la Russie actuelle. Mais cela
présuppose beaucoup d’événements improbables : 1) que la politique des
entreprises d’armements occidentales fassent passer l’intérêt du bloc avant
leur intérêt financier ; 2) que la Russie n’augmente pas elle aussi sa
production durant ce laps de temps à la même vitesse voire à une vitesse
supérieure ; 3) que la guerre en Ukraine ne soit pas terminée avant (par
la victoire de la Russie).
Je n’ai parlé jusqu’ici que des
facteurs palpables, matériels, qui peuvent en partie expliquer la contradiction
entre ce que nous disent les chiffres bruts et les faits observables sur le
terrain. J’ai tour à tour invoqué la différence de pouvoir d’achat, les
capacités de production bien plus extensibles de la Russie et enfin la
politique économique différente des deux blocs. Tout cela nous rapproche de la
vérité, sans la moindre doute, mais on sent bien que le tableau n’est toujours
pas complet. Même avec les faiblesses citées, le bloc occidental devrait au
minimum pouvoir obtenir pat dans ce conflit, étant donné les énormes
différences en son avantage de population ou de richesse. Or, il est de plus en
plus clair que nous nous dirigeons vers un mat des Russes sur le roi ukrainien
(qui en réalité est bien sûr un fou).
Et c’est là qu’on est obligé de
faire appel à des facteurs humains, sociaux et psychologiques pourrait-on dire.
Il est évident que nos pays ne sont pas du tout préparés à ce type de guerre
totale comme celle qui a cours en Ukraine. Imaginez un instant que l’illégitime
Macron ou la saucisse Scholz déclare dans un élan de zèle atlantiste la
mobilisation générale ou même partielle : en moins de trois mois, le pays
se viderait de ses éléments mâles en âge d’être conscrits pour des cieux moins sombres. C’est ce qui s’est passé en Ukraine. Mais le
mouvement sera encore plus fort dans nos pays tout simplement parce que les
gens ont plus d’argent, plus d’économies, et peuvent donc plus facilement
passer à l’étranger ou envoyer leurs fils vers une destination sans risque pour
le temps qu’il faut. Disons-le clairement, le fait que l’Ukraine soit le pays
le plus pauvre d’Europe (à égalité peut-être avec la Moldavie, qui semble
justement s’apprêter à suivre le chemin pavé de gloire de son voisin du nord),
depuis des décennies, est un facteur majeur dans le "succès' de l’opération
washingtonienne démarrée en 2014. Jamais sans cela, la CIA n’aurait pu
transformer ce pays en moins de dix ans en poing armé contre les Russes et
jamais l’armée ukrainienne n’aurait pu perdurer jusqu’aujourd’hui. De plus,
dans nos pays, les populations sont tellement fragmentées entre les races, les
religions, les opinions politiques, les classes, les multiples sexes et les
âges qu’une mobilisation est la recette la plus sûre pour connaître de grands
troubles civils. En fait nos gouvernements le savent si bien qu’ils n’essaient
même pas (et ce n’est pourtant pas l’envie qui leur manque).
Mais la mobilisation se heurterait à
un problème supplémentaire (contrairement à la Russie qui a gardé un service
militaire obligatoire) qui est que nos armées sont à 100% professionnelles
depuis des décennies, ce qui signifie qu’il faudrait partir de zéro pour faire
du pékin pris dans la rue un soldat même minimalement compétent.
Enfin et surtout le problème majeur
réside évidemment dans la motivation. Pensez-vous que les Français, les
Allemands, les Anglais vont aller faire la guerre de tranchées pour des Macron,
des Scholz, des Starmer, des Biden ou des Harris ou des Trump ? Autant
croire au père Noël ! On peut déjà prévoir que les exemptions signées par
le médecin de famille vont se vendre comme des petits pains.
D’une manière générale, ce qui
manque chez nous est la culture de la guerre. Pour nous, Européens, et encore
plus chez les Étasuniens qui n’ont pas connu de conflit sur leur terre depuis
des lustres, la guerre est devenue une chose abstraite, virtuelle, lointaine, qu’on
ne connaît que par des films ou des jeux vidéo. Là où la Russie a maintenue une
culture de la guerre importante, en partie due au fait qu’ils ont perdu
vingt-six millions de personnes lors de la dernière guerre mondiale, ce qui
veut dire que toutes les familles russes ont encore aujourd’hui des parents qui
sont morts à la guerre. La Russie est le seul pays d’Europe qui ait bâti une
cathédrale, la plus belle cathédrale moderne, la cathédrale de fer, en hommage
à leurs soldats disparus (voir cet article-ci). Que cette cathédrale
soit dédiée à l’Armée Rouge n’a qu’une importance secondaire, que nous
trouvions l’idée ridicule ou monstrueuse en a encore moins. Cette cathédrale
magnifique est là et révèle une ferveur que nous sommes incapables de
comprendre, encore moins d’imiter. En raison de cette culture, de ce marquage
au fer rouge, l’État russe n’a eu aucune peine à ranimer la flamme de la grande
guerre patriotique lorsque le moment est venu. Chaque mois, trente mille
volontaires en moyenne affluent vers les centres de recrutement de l’armée de
la Fédération. Ils viennent de partout, comme toujours davantage de la campagne
que des villes et davantage des régions pauvres que des régions riches mais ils
viennent et ils sont motivés, contrairement à ces pauvres ukrainiens (en
attendant peut-être ces pauvres Polonais, ces pauvres Moldaves, ces pauvres
Baltes, ces pauvres Roumains …). Une illustration flagrante a été dernièrement
fournie par une initiative du gouvernement polonais qui a décidé de lancer un
appel pour former une sorte de légion étrangère destinée à renforcer l’armée de
Kiev. Comme la Pologne a reçu depuis quelques décennies un contingent énorme
d’immigrés ukrainiens, plusieurs millions, elle pensait trouver facilement de
quoi monter au minimum une brigade. Résultat, seule une quinzaine de volontaires
ukrainiens se sont présentés, pas même de quoi faire une section (l’unité
commandée chez nous par un adjudant ou éventuellement un officier subalterne
type sous-lieutenant). Il est vrai que la paie et les primes éventuelles du
soldat russe sont relativement importantes, surtout pour un paysan ou un
ouvrier de Sibérie, de l’Oural, du Caucase, mais ce n’est qu’une incitation de
plus. Les queues devant les bureaux de recrutement n’ont jamais été aussi
longues depuis le massacre du Krokus et surtout depuis que le grand Volodomyr
Z. a lancé son opération de Koursk, son plan génial pour vaincre la Russie
(voir cet article-ci). L’argent est le nerf de la guerre et le Kremlin
n’oublie pas cet adage. Mais à l’épreuve du feu, l’argent seul n’a jamais été
une motivation suffisante. Un bon exemple de ce fait est la diminution en chute
libre du nombre de mercenaires étrangers que parvient à embaucher l’armée
ukrainienne : ceux-ci ont une tendance invincible à prendre la poudre
d’escampette une fois qu’ils ont compris qu’ils n’étaient pas là pour
participer à une sorte de safari, comme en Irak, en Afghanistan ou en Lybie, qu’ils
avaient toutes les chances de ne pas revenir (les mercenaires n’étant pas
protégés par les conventions de Genève, l’armée russe par une coïncidence
étrange ne fait pas de prisonniers parmi les mercenaires étrangers, que ce soient des Polonais, Colombiens, Anglais, Tchèques, Norvégiens, Français, Baltes,
Japonais, Tchétchènes ou même Biélorusses, peu importe ; je n’ai en effet
pas pu voir un seul prisonnier étranger en Russie, non-ukrainien, malgré les
innombrables vidéos postées sur le sujet depuis le début de la guerre ;
les seuls encore en vie au moment de leur capture semblent avoir brutalement
décédé quelques minutes ou quelques heures après pour des raisons peu
mystérieuses).
En guise de conclusion morale, on
peut dire que l’argent n’a bonne odeur que tant qu’on n’a pas senti celle de la
mort, tout près de soi, ou mieux encore, sur soi.
*Propos attribué à Bismark.
samedi 12 octobre 2024
Sanctions, sanctions, sanctions et autre inepties Eurozonées
Usine géante de traitement du bois dans le merveilleux pays du Père Noël (on me dit qu'ils y croient) |
Parmi les milliers de sanctions
prises contre la Russie, il en est une qui a attiré particulièrement ma
sympathie, sans doute parce que la sylviculture est ma principale (et à peu
près seule) compétence, quoiqu’à dire vrai très loin derrière l’écriture, et
aussi parce qu’on peut y trouver toutes les marques inimitables du ‘travail’ toujours
inspiré de la Commission Européenne (CE). Depuis l’été 2022, les heureux pays
de l’Euro zone, parfois appelés les Zonards, ont en effet le devoir de
n’importer aucun produit bois de Russie. Très peu notée en France, puisque le
secteur bois y est plutôt un boulet et qu’il est très difficile de faire la
part de l’effet des sanctions de l’inefficience ordinaire régnant ici, elle a
été très fortement ressentie dans un autre grand pays de ce club chanceux qu’on
appelle l’UE, un pays très forestier, c’est-à-dire où le poids du secteur forestier
est considérable dans l’économie nationale, surtout si on la considère depuis
l’amont jusqu’à l’aval (de la fabrication de la tronçonneuse jusqu’à la grume
brute, ou plutôt l’inverse) un pays boisé pour plus de 70% de sa surface, un
pays qui commence par un F et finit par un e… et non ce n’est donc pas la
France.
Bien, grâce à ma phrase serpentine,
vous avez eu le temps de réfléchir et de deviner que ce pays en question est la
Finlande. La Finlande dispose, comme je l’ai dit, de ressources forestières
considérables par rapport à sa taille, très modeste. Néanmoins ce qui est
encore plus considérable, c’est sa capacité de production qui excède de loin sa
ressource domestique disponible. Ah, mais comment est-ce possible ?! En
effet, une des lois les moins mystérieuses de la sylviculture est de ne pas
couper plus de bois que ce que les forêts produisent si vous ne voulez pas
rapidement vous retrouver à sec. Et quand une forêt nordique est à sec, c’est
pour très très longtemps (les arbres mettent en effet beaucoup, beaucoup plus
de temps à pousser que, disons, en Guyane).
D’abord, précisons quelques points
utiles pour la compréhension de cet article. Comme les Français sont bien
placés pour le comprendre, le volume de bois disponible n’est pas du tout égal
au volume de bois existant dans un pays. Une partie plus ou moins grande est de
fait indisponible, c’est-à-dire en fait non rentable, soit en raison de reliefs
trop escarpés, soit en raison de terrains trop marécageux, soit tout simplement
parce que les essences disponibles dans ces forêts n’ont pas vraiment d’intérêt
économique (en dehors d’un petit usage local en bois de feu et autres menus produits
de sorcellerie en vogue) et vous avez alors tout à fait raison de me donner
l’exemple de nos forêts méditerranéennes. La Finlande n’est pas dans le cas de
la France. Bénéficiant d’une platitude à peu près parfaite, ses forêts de type
taïga (ce qui n’est jamais qu’un mot d’une langue barbare pour dire… forêt)
sont intégralement peuplées par trois essences principales toutes d’un grand
intérêt économique (là-bas, pas forcément chez nous) : l’épicéa, le pin,
le bouleau. En dehors des marécages, le pays ne présente pas de difficultés
d’exploitation. Ainsi donc ce pays a la très rare chance d’avoir la double
particularité de posséder un ratio surface boisée/surface totale et un ratio
surface boisée exploitable/surface boisée totale tous deux tournant autour de 2/3,
ce qui est énorme, surtout pour un pays soi-disant riche. En fait, même si je
n’ai pas vérifié ce point, je ne serais pas étonné que la Finlande soit le pays
au monde qui possède le ratio de surface de bois exploitable/surface totale le
plus élevé au monde. Et ne me parlez pas des forêts équatoriales, type Guyanes,
dont le même ratio est ridiculement faible. En chiffres absolus, on estime que
la surface boisée totale de la Finlande est de 26 millions d’hectares pour une
surface disponible de17 millions, dernier chiffre qui est exactement la surface
boisée totale de la France. Et comme les forestiers finnois sont des
roublards (mais rassurez-vous, nous faisons la même chose ici), ils se sont
assurés que la majeure part de leurs forêts protégées (donc sans aucune coupe)
se situe précisément dans la partie marécageuse ou en lisière de toundra, de
toute façon inexploitable.
Eh bien malgré tous ces avantages,
la Finlande a néanmoins besoin d’importer de grandes quantités de bois, soit
sous forme de grumes entières, soit sous forme de sciages, soit sous forme de bois
de feu (pour faire divers combustibles que vous utilisez peut-être sans le
savoir), pour faire tourner leurs scieries et usines de traitements du produit
bois. Et c’est de la bonne économie. Un des meilleurs moyens connus de
s’enrichir rapidement est de faire venir des matières peu ou pas transformées
pour obtenir une forte valeur ajoutée avant de revendre les produits finis. La
France rêve depuis longtemps de le faire sans jamais y être parvenue (dans le
secteur bois, c’est principalement la lointaine Chine qui nous rend ce
‘service’ inestimable). Il suffit d’en avoir la capacité industrielle et il se
trouve que la Finlande l’a.
Donc, il n’y a pas si longtemps, la
Finlande importait des volumes industriels de bois russe (puisque la Russie
possède tout de même 800000000 ha de surface forestière, oui, vous avez bien
lu : huit cents millions d’hectares boisés selon la définition
internationale d’une surface boisée, soit une quinzaine de France ou une grosse
vingtaine de Finlande mises bout à bout), en faisait des produits à plus haute
valeur ajoutée et les revendait. Un très bon deal pour le pays scandinave,
comme on voit. À la suite de la décision de la CE, les industriels finlandais pourtant
habitués à la créativité sans égale de nos législateurs Eurozonés se sont
retrouvés avec le choix simple suivant : soit trouver des fournisseurs de
rechange, soit réduire fortement leurs capacités de production. Faire venir du
bois de pays tiers non-sujets à cette sanction comme la Turquie ou la Chine qui
continuent évidemment d’importer du bois russe était trop cher puisque chaque
intermédiaire prend sa commission au passage, d’autant plus élevée quand on
sait que l’acheteur est coincé, aux abois ; quant aux voisins scandinaves
qui ont eux aussi un peu de taïga, ils ne voulaient ni ne pouvaient de toute
manière fournir dans les quantités demandées. La première solution s’étant donc
avérée impossible, je vous laisse deviner le temps d’un autre paragraphe instructif
quelle a été leur décision.
Je rappelle dans ce paragraphe à
toute fin utile que le but de la sanction vue depuis l’Euro zone est en principe
d’affaiblir davantage l’économie russe que celles des heureux pays
membres du club des 27. Les résultats de l’opération antirusse se sont soldés fin
2023 (et ce n’est que le début) par le bilan suivant : en l’espace d’un
an, on a assisté à la diminution d’un tiers, au minimum, des importations de la
Finlande, ce qui naturellement induit une diminution correspondante dans sa
production de planches, charpentes, pâtes et autre produits dérivés dont la
plus grande partie était destinée à l’exportation ; cette diminution sur
le marché induit à son tour une explosion des prix du produit bois, en
particulier les produits vendus par la Finlande, comme on a pu s’apercevoir
très récemment en France (mais naturellement, aucun officiel n’a fait le lien
entre cette brusque hausse et l’opération antirusse). Exactement dans le même
laps de temps, un an au plus, la Russie a non seulement retrouvé son niveau
d’exportation d’avant 2022 mais l’a augmenté et pas de l’épaisseur d’une
brindille, hein, de 30% : il lui a suffit pour cela de rediriger ses
exportations vers d’autres pays demandeurs (et ceux-ci ne manquent jamais pour
des produits basiques) : Turquie, Egypte, Kazakhstan, Kirghizstan, EAU,
Corée du Sud (celle-là, bon toutou pourtant, n’a pas dû recevoir le mémo de
Washington) et bien sûr Chine. Actuellement, les revenus de la Russie liés au
bois sont en hausse d’un tiers par rapport à 2021, dernière année avant
sanction, pour une balance commerciale nette positive de 8,4 milliards de
dollars en 2023 et la tendance est à la hausse rapide pour 2024, chiffre à
comparer, par exemple et au hasard, avec le déficit chronique de la filière
bois française qui a atteint 9,5 milliards d’euros en 2022 (je n’ai pas les
chiffres de 2023, inévitablement horribles).
Ce retour de boomerang peut être
retrouvé dans pratiquement n’importe quel autre secteur où la CE a sévi avec
ses innombrables sanctions antirusses. Le résultat est toujours le même. Et
bien que le résultat soit toujours le même, le processus est sans cesse
renouvelé, dans l’espoir sans cesse différé mais jamais éteint que la même
cause ait enfin un effet différent. J’aurais pu si j’avais le temps et je ne
l’ai pas, je ne l’ai plus, prendre le merveilleux exemple de la sanction visant
les compagnies aériennes russes où la seule lecture d’une carte, la simple
connaissance la plus basique de la géographie de l’hémisphère Nord aurait dû
faire comprendre aux inégalables cerveaux en charge de nous guider sur la voie
du bien, de la justice et de la vertu que la sanction ne pouvait que se
retourner contre leurs propres compagnies aériennes et favoriser indûment
toutes celles qui peuvent continuer à traverser l’espace aérien russe (hé oui,
c’est grand la Russie, 9 ou 10 fuseaux horaires, cela en fait du chemin en plus
pour la contourner !) : c’est de la géopolitique à la portée d’un
enfant de six ans jouant dans une cour de récréation.
C’est aussi un secret de polichinelle pour
quiconque veut bien se débrancher un moment de la Matrice, que les décisions de
la CE sont inspirées, voire fortement soufflées par Washington, tout
spécialement concernant les sanctions antirusses. Ces sanctions ne sont en
effet pas trop impactantes pour notre grand ami de l’Ouest, d’autant moins
qu’il est le premier à ne pas les appliquer quand ça l’arrange (l’an passé, les
USA ont encore importé pour 1,5 milliard de dollars de bois russe pour ne
parler que de ce sujet). Le problème pour l’Europe est qu’elle n’a ni la
situation géographique ni les ressources de son grand ami pour pouvoir se
livrer à ce type de chantage sur la Russie. C’est elle qui dépend vitalement de
la Russie et pas l’inverse (elle est la seule à ne pas le savoir). En plus de
sa pauvreté en ressources, elle est en cours de désindustrialisation rapide
(ayons une pensée émue pour la grande baisée d’outre Rhin) et maintenant commence
à boire la tasse du côté de l’agriculture (et pas seulement à cause d’une météo
défavorable, voir mon article précédent). Et cela continue. En effet, on m’annonce que ces sanctions qui
ont eu de si puissants effets (quoique dans le sens inverse du mouvement
appliqué) vont être implémentés contre cette fois… la Chine, sous forme de
barrières douanières. Ah ! un vrai coup de maître cette fois. Ainsi l’UE
au comble de sa puissance devenue incommensurable va s’attaquer à la première
puissance industrielle mondiale (et de très loin) sur le terrain… industriel.
C’est exactement ce qu’elle a fait avec la Russie sur le terrain des matières
premières où celle-ci est sans rivale. Je le répète : même un enfant en
primaire sorti de la cour de récré sait que cela ne peut que très mal se
terminer quand un nain attaque un géant : c’est une simple question de connaître
l’équilibre des forces et ce n’est vraiment pas difficile de le savoir dans ce
cas. Tous ces effets des sanctions, qui vont du minable au catastrophique avec
une moyenne tirant plutôt nettement vers le dernier que le premier, et
l’obstination à persister dans le schéma perdant, indique un découplage à peu
près total du réel de la CE et des autres politiciens en charge de cette (minuscule)
partie du monde. On a affaire à des gens plongés dans la Matrice et qui ne
veulent surtout pas être débranchés. Mieux, tout leur travail, comme celui de
l’agent Smith de la Matrice, est de s’assurer que tout le reste du bon peuple (bon
peuple : novlangue pour ramassis à base d’abruti et d’idiot congénital) reste
sagement branché, absorbant avec délectation le monde fantastique mais
rassurant que leur présente leur petit, moyen ou grand écran. Il faut bien
réaliser ceci : dans notre Océania, les politiciens comme les gens des
médias au service de l’oligarchie au pouvoir sont tous des agents Smith, pas
Winston hein, juste Smith, rien de plus et rien de moins.
Au sommet de sa gloire, qui n’est
éloignée que de quelques années, le secteur bois de la Finlande employait 15%
des travailleurs industriels du pays, contribuait pour 18% de sa production
industrielle et pour 20% de ses exportations en euros. Il est inutile de dire
que cette époque est dans un passé révolu et ce ne sont pas les derniers
événements en cours qui peuvent inciter à l’optimisme pour les prochaines
décennies ou le prochain siècle… s’il y en a un. En avril de cette année,
Merikarvia, une des plus grosses scieries du pays mettait la clef sous la
porte, l’usine de pâte à papier Joutseno licenciait à tour de bras, le tout
nouveau port à sec de Kouvola, qui avait coûté des dizaines de millions d’euros,
se retrouvait… à sec, après avoir fonctionné seulement six mois.
Et ce n’est que le commencement.
À bientôt… peut-être.
Autres articles sur le grand basculement en cours : ici et là.
dimanche 22 septembre 2024
Le parti de l’Extrême-Cintre—Marx, un soixante-huitard très précoce—Les quatre cavaliers de l’Eurocalypse
Comme on peut le deviner au titre hétéroclite, cet "article" est en fait un florilège de nos réflexions géniales, certes, mais pour une fois très modestes et sans grand lien entre elles. Ceci n’est donc pas un article, pour paraphraser Magritte.
Le parti de l’Extrême-Cintre
Le parti Centriste, en politique, peut se définir par le fait qu’il vise toujours le cadre (le but comme on dit chez les footballeurs). Ce sont des gens de bon sens puisqu’il est incontestable que si on veut marquer des buts, il faut viser à l’intérieur du cadre. Ou pour le dire autrement, on ne peut espérer marquer si on tire à côté ou trop haut. Néanmoins, l’excès de bons sens chez des gens qu’on pourrait appeler les Extrêmes-Centristes fait qu’ils visent toujours le centre du but, ni à gauche ni à droite ni en haut ni en bas, c’est-à-dire qu’ils visent là où se trouve généralement positionné le gardien. Notez qu’ils ne visent pas l’espace situé entre ses jambes, ce qui fait souvent mouche, mais bien à mi-hauteur, en pleine poitrine. Si on ajoute ce fait à l’absence totale de surprise qui les caractérise, il ne faut pas s’étonner que les Centristes marquent rarement de but. Toutefois, leur bon sens a raison sur un point : si le gardien se troue (chose rare à se niveau) ou s’il est parti momentanément à la buvette et que le but est vide, alors ils vont marquer.
Macron, Von Der Layen et leurs semblables ainsi que que tous leurs prédécesseurs — et on peut remonter au moins jusqu’à Chirac et ses dream teams consécutives — sont réputés appartenir au camp du Centre. On se demande bien pourquoi. En effet leurs politiques se distinguent précisément par le fait qu’elles sont à peu hermétiques à tout bon sens. Ce sont des gens qui non seulement visent en dehors du cadre, trop haut ou à côté, mais réussissent bien souvent à tirer dans leur propre but. Il faut admettre que leurs actions sont parfois, souvent en fait, absolument spectaculaires, des lobs parfaitement dosés sur leur propre gardien, des retournées depuis le milieu du terrain, des coups de billards si savants que même les calculs des supercalculateurs échouent à les reproduire, des trajectoires de boomerang qu’on croirait physiquement impossibles avant de les avoir vues. Comme tout spectateur de foot le sait, les buts les plus beaux, les plus incroyables, les plus prodigieux sont des buts contre son camp. Néanmoins, comme ces buts prodigieux sont comptés pour l’adversaire, cela leur enlève beaucoup d’intérêt, surtout si on est supporter de l’équipe qui marque régulièrement ces buts contre son camp. On pourrait même qualifier ces rois de l’inversion d’insensés et ce sans aucune exagération. C’est pourquoi nous proposons d’appeler dorénavant le parti unique de Macron, Von Der Layen, Scholz, Starmer et Cie le parti des Extrêmes-Cintrés.
Marx, un soixante-huitard très précoce
Le soixante-huitard type se caractérise par son état d’éternel étudiant, son absence de goût et de compétence pour le travail, je veux dire le vrai travail qui produit quelque chose de concret au bout du compte, et son absolue conviction qu’il peut et doit néanmoins apprendre la vie à ceux qui travaillent pour de vrai. C’est un donneur de leçon né. Enseigner la classe laborieuse, grâce à leur longue expérience de l’étude du travail, tel est le but général de ces grands allergiques au travail. Marx répond parfaitement à cette description qu’on résume souvent sous le terme évidemment laudateur de bourgeois bohème, bobo pour les intimes. Il avait seulement un gros siècle d’avance sur tout le monde. Marx n’a jamais franchi le seuil d’une usine, même en tant que visiteur, et encore moins — faut-il le préciser — en tant que travailleur. Il n’a jamais fréquenté ni de près ni de loin un spécimen d’humanité pouvant rentrer dans la case prolétaire ; sa seule connaissance avérée du sujet lui a été fournie par ses lectures de Proudhon. Cela ne l’a nullement empêché de passer l’essentiel de sa vie à prêcher pour la classe laborieuse, à enseigner quelle politique, quelle économie sont bonnes pour elle. Marx est l’archétype du philosophe du pont dunette qui parle de (et non pas à) l’homme du fond de la cale. Il est aussi une sorte de reflet inversé de Rousseau, qui tout aussi bizarrement, et plus masochistement, s’était mis dans la tête d’enseigner la vie à la grande bourgeoisie et à la noblesse, lui qui était pourtant indéniablement fils de travailleur et qui est resté prolétaire jusqu’au bout (car lorsque vous prenez le même prix à la page pour vos essais philosophiques que pour vos copies de partition musicales, le vrai métier de Rousseau, on peut dire que vous êtes un écrivain prolétaire). Le trait commun de ces deux philosophes politiciens est qu’ils enseignent tout particulièrement les sujets pour lesquels ils n’ont justement aucune pratique reconnue, le travail pour l’un, l’éducation des enfants pour l’autre, et en plus à des gens qu’ils connaissent très mal ou pas du tout. Notre conseil de prudence : ne prenez les bonnes paroles des gens concernant des sujets où ils n’ont pas de ‘skin in the game’ qu’avec les plus longues pincettes.
Bien, voilà qui est dit, mais nous n’en avons pas encore tout à fait terminé avec Marx. Pour les raisons que nous venons d’énoncer trop lapidairement, Marx est un génial usurpateur en politique, en économie, et peut-être même en Histoire. Il n’est pas le seul qui a connu ce succès bien mérité. Toujours chez les Allemands, Nietzsche est lui le génial usurpateur de la philosophie mondiale. Et Freud, grand analyste littéraire nous dit-on, est le génial usurpateur dans le domaine de la médecine. Avec Darwin, autre usurpateur grandiose de la science, nous obtenons les quatre cavaliers de l’Eurocalypse actuelle. Cela leur a pris un peu de temps pour répandre leur vague en ondes concentriques de plus en plus en plus grandes dans les quatre dimensions et transformer la culture et la société européenne en champ de ruine mais ils sont maintenant sur le point d’accomplir leur glorieuse mission. Bravo à eux. Nous tenions à les féliciter, nous qui sommes pour une forte réduction des populations, surtout de celles qui travaillent, et donc des gaz sataniques afférents.
PIB, l’indic aux tuyaux pourris.
Dernièrement, nous écoutions une émission où un jeune agent de la Matrice, branché et cloué a vie sur son fauteuil probablement troué (du moins on espère pour lui) interviewait Alasdair Macleod. Macleod est Britannique, ce qui en général est un mauvais point, pire encore s’il est Ecossais, mais qui lorsqu’on cause de finances au niveau international (et non de vos économies sous votre matelas dont nous nous contrefoutons) est un gros avantage vu que personne ne peut mieux connaître les rouages de la finance mondialisée que ceux qui en sont à l’origine. C’est toujours la même histoire : si vous voulez un vrai bon flic, embauchez un ancien gangster ; si vous voulez un vrai bon ami des bêtes, embauchez un ancien braconnier ; si vous voulez un vrai connaisseur en capitalisme sans foi ni loi, embauchez un ancien banquier anglo-saxon. Macleod ne paie pas de mine, surtout comparé à son jeune interviewer qui semble sorti d’un salon de beauté : il est vieux, il n’a plus guère de cheveux, il a un gros nez rouge qui sent l’alcoolique non repenti et il est à peu près aussi beau que Mister Magoo. Mais c’est quelqu’un qui a appris à réfléchir il y a sans doute des décennies de cela et qui a gardé le bon réflexe. De plus, comme je le sous-entendais, c’est un ancien banquier, un ancien trader aussi, c’est dire qu’il réunit toutes les compétences du gangster financier international. Eh bien dans cette émission, il expliquait en termes simples comment et pourquoi le PIB est devenu une mesure pour le moins inadéquate, une simple fiction, mais une fiction très utile pour le monde occidental. Le PIB nominal est l’indicateur préféré de ces économistes agents de la Matrice que vous pouvez régulièrement apercevoir dans votre écran TV (le PIB par parité de pouvoir d’achat est un peu mieux mais on continue d’ajouter des vides avec des pleins comme si les vides étaient des pleins). Cela se comprend car il permet à ces doctes escrocs de vous assurer qu’un vide est un plein, qu’une soustraction est une addition, qu’un signe moins est un signe plus. En gros, Macleod estime qu’on peut égaler la taille du PIB d’un pays occidental à la quantité de dettes ou de crédits qu’il détient. Et comme ces crédits ne sont nullement alloués à des investissements productifs mais servent à augmenter encore plus de dépenses improductives et enfler toujours davantage les cours de la Bourse pour le (gigantesque) bénéfice de quelques-uns, son rapport avec la puissance économique réelle d’un pays est dangereusement proche de zéro. Par puissance économique réelle, il faut entendre tout ce qui sert à produire un bien matériel ou intellectuel utile à la société. Basiquement, il s’agit de l’agriculture (sans quoi il n’est même pas utile de discuter du reste), de l’extraction de matières premières (le fait de posséder des matières premières n’a aucun intérêt si elles ne sont pas extraites et tous les pays ne sont pas capables d’extraire leurs matières premières — suivez notre regard), de la production d’énergie, de la production industrielle et enfin de la capacité militaire. Certains à l’esprit plus fin que nous avanceraient même que le dernier indicateur suffit puisqu’il implique les quatre autres. De même, il n’est pas utile de rajouter dans ce calcul les poids des infrastructures, de l’Administration, de l’Éducation (en réalité, Instruction serait plus correct) ou de la Santé puisque ces domaines sont nécessairement impliqués par les cinq premiers (les guerres sont souvent à l’origine des plus grands progrès en médecine). L’idée que l’on peut atteindre un grand savoir-faire technologique sans médecine ou instruction de niveau comparable est une fantaisie scénaristique digne de ‘La Guerre des Mondes’, où des extraterrestres capables de voyager à travers la galaxie et possédant des armes surpuissantes ignorent qu’il existe des vilaines bêtes microscopiques porteuses de maladies, en particulier pour les organismes étrangers. D’une certaine manière, on peut dire que la guerre est l’étalon ultime pour mesurer les vraies forces d’une nation (ou d’une planète dans le cas du roman de Wells), de son économie, de ses liens sociaux, de ses politiques, de sa population, de sa culture. Il est évidemment dommage qu’il faille en arriver là pour remettre les pendules à l’heure mais il semble que ce soit le seul moyen efficace en ce bas monde.
Le ‘peak oil’ que personne n’a vu venir.
Nous disions ci-dessus que le premier pilier d’une économie était l’agriculture. En effet, il n’est pas utile, je pense, de démontrer cette affirmation que si vous avez le ventre vide, toutes les autres questions deviennent quelque peu futiles et pour tout dire inintéressantes. On nous prédit depuis au moins un demi-siècle le peak oil pour nos sociétés très gourmandes en énergie, de préférence bon marché, et il n’y a pas d’énergie en ce monde plus idéale que le pétrole. Son surnom d’or noir est absolument mérité. Nous aimons dire d’ailleurs que le pétrole est la huitième merveille de l’univers, juste un peu après l’eau. Eh bien ce peak oil sans cesse annoncé n’a pas eu lieu. En revanche un ‘peak oil’ qui n’a pas été annoncé et qui est bel et bien arrivé, dans l’indifférence quasi générale, tout du moins des médias de la Matrice, est celui de l’agriculture. Notre agriculture, à nous les ‘riches’, pas celle du Sud Global qui semble loin de l’avoir atteint. Peut-être avez-vous entendu parler des ‘petits’ problèmes qu’ont rencontrés les agriculteurs français cette année, ce qui les rend très tristes, nous voulons dire un peu plus que d’habitude. Peut-être, sûrement, vous a-t-on dit que c’était de la faute de la météo exécrable, ou plutôt en novlangue, la faute du dérèglement climatique. Et certes la météo pluvieuse de cette année (depuis la mi-octobre 2023 en fait) a été très préjudiciable pour les céréaliers en particulier mais ce n’est que le catalyseur d’un phénomène en cours beaucoup plus vaste et beaucoup plus durable. Tous les pays occidentaux, y compris les USA, sont en train de voir leur production totale ou leurs exportations en volume de dollars ou même les deux, diminuer régulièrement depuis quelques années. Et ce n’est que le début. Nous parions que tous les secteurs de l’agriculture vont être impactés dans les années qui viennent : céréales, oléagineuses, maraîchage, vergers, élevages, lait, viande, œufs. La météo ou le climat n’aura rien à voir avec le phénomène, si ce n’est d’atténuer ou d’accélérer la tendance selon les années (qui se suivent et ne se ressemblent pas). Et naturellement, les fermes vont fermer. Dans dix ans, nous, habitants de la France, pays d’agriculture s’il en est, devrons acheter massivement à l’étranger les produits de base pour nourrir la totalité de la population. Ou bien nous revendrons nos terres arables à des étrangers, ce qui revient peu ou prou au même. Cela s’est passé et cela continue à se passer en Ukraine aujourd’hui. Vous croyiez que c’est une spécificité de ces slaves demeurés ? alors repensez-y.
Un grand pas pour la planète
Comme notre sous-titre l’insinue, nous allons conclure ce pot-pourri de nos commentaires actuels et inactuels par un peu de prospective science-fictionnesque mais à peine. Nous devons avouer que nous avons été bien aidé par la dernière idée géniale de nos grands amis des services secrets israéliens pour réduire les populations à la taille congrue, à savoir diviser ces dites populations par dix, puisque, rappelons-le pour ceux qui n’auraient toujours pas appris par cœur notre manifeste, tel est le but premier de l’Homocidaire engagé et éco-responsable. L’idée de piéger des milliers de téléphone portable est évidemment géniale dans cette optique. Bien sûr il ne faut pas se contenter d’appliquer cette mesure contre les méchants Palestiniens ou les méchants Libanais ou les méchants Syriens, bref les méchants arabes ; il faut évidemment étendre cette mesure de Justice aux méchants Perses, aux méchants Chinois, aux méchants Russes, aux méchants Cubains, aux méchants Vénézuéliens, aux méchants Brésiliens, aux méchants Nigériens, aux méchants Maliens, aux méchants Turcs, aux méchants Indonésiens, aux méchants Guatémaltèques et pour faire bonne mesure aux Indiens (ceux d’Inde), même s’ils ne sont pas aussi méchants que les autres, de sorte que nous devons arriver à non loin de 90% de la population mondiale, ce qui est le but final. Pour mieux atteindre ce noble objectif (et plus rapidement) nous conseillons d’étendre ce dispositif à d’autres appareils munis de batteries comme les postes TV, les PC ou Mac (nous ne sommes pas sectaires), les tronçonneuses électriques, les machines à laver, les postes de radio, les brosses à dent électriques, les machines à calculer et bien sûr les voitures, bus et camions, électriques ou pas. Notons que les téléphones et les ordinateurs sont particulièrement intéressant parce qu'il est certainement possible de les programmer pour déclencher l'étincelle fatale lorsque des paroles non sanctifiées par la Matrice sont prononcées ou écrites par leur intermédiaire, ce qui permettrait en plus un tri souhaitable entre le bon grain et l'ivraie (toujours beaucoup plus nombreuse) Nous ne voyons qu’un petit défaut dans le procédé mais tout à fait véniel. En effet, il serait possible que des méchants pas encore morts aient l’idée très méchante de copier cette merveilleuse innovation (comme ils ne font que copier nos belles idées) et nous retournent le cadeau.
La moralité de cette histoire est évidente, à savoir que nous avons bien raison de ne toujours pas posséder à ce jour de téléphone portable personnel.
Un autre pot pourri, sans ironie : ici.
vendredi 6 septembre 2024
Les grands maîtres du fantastique : Poe, Le Fanu, Maupassant, Borges
'L'île des morts' de Böklin, version III |